(Article originalement publié pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici quelques années après, car il garde je crois son intérêt socio-politico-économique.)
Toulouse reste depuis des mois envahie en son cœur même par les travaux de sa seconde ligne de tramway. Il était déjà difficile de circuler en centre-ville, c’est devenu annonciateur du rejet de la voiture dans la Ville Rose.
En quelques années, les voies de circulation, déjà étriquées dans un centre ancien, se sont vues rognées : rues piétonnes, voies pour bus, pistes cyclables et maintenant le tram. Il parait que c’est une avancée majeure : la voiture « polluante » est repoussée peu à peu hors de la ville où la place est faite aux transports en commun, seuls garants d’un transport à la fois « social » et « écologique ». Pourtant, il existe un éclairage bien moins flatteur sur cet accent lyrique à la mode.
Les voies pour bus semblent l’idéal pour leur ouvrir le trafic, avec leurs « foules » de passagers laborieux allant plus vite, plus loin, pour pas cher – enfin paraît-il. Mais la réalité est autre. Les bus sont le plus souvent peu chargés, voire vides. Les voies sont vides le plus clair du temps. Comparez la densité de passagers à l’heure dans les bus et celle des automobilistes, il n’y a pas photo. Pourquoi serait-il plus juste de pénaliser les automobilistes dans les bouchons en diminuant la largeur de leurs voies de circulation, au lieu de les élargir pour fluidifier la circulation ?
Le tramway pousse le raisonnement un cran plus loin. Il prend un espace énorme, devenu inaccessible à tout véhicule « libre ». Le trafic et le débit réel sur ces surfaces sont dérisoires face aux mêmes voies rendues aux quatre roues. Et il a un social défaut majeur : il mobilise d’importants investissements aux nuisances énormes. Investissements qui n’en sont pas puisqu’ils ne sont jamais rentabilisés, reposant sur le seul arbitraire du monde politique et non sur la décision du marché.
La pollution ? C’est une vraie question. Mais en quoi bouter la voiture hors de la ville serait la seule bonne réponse ? En quoi les transports en commun seraient-ils l’unique solution à la pollution ? Tous les experts s’entendent-ils sur ce point ? Serait-ce à eux de décider de ce que notre vie et notre ville doivent être et devenir ? En aucun cas, la décision nous revient. D’autant que le marché automobile offre des véhicules toujours moins polluants et que les véhicules à zéro rejet polluant arrivent.
Entre le confort et la souplesse apportées par la voiture et la réduction supposée – mais incertaine – de la pollution en faveur des bus et trams, l’arbitrage est complexe. Et justement parce qu’il est complexe, ce n’est certainement pas à une bureaucratie, fut-elle dirigée par des élus, d’arbitrer. Son rôle au sein de la démocratie se limite à organiser l’arbitrage par le peuple. Le comprennent-ils ?
Pour un arbitrage efficace et continu sur de telles questions par le peuple, il existe un mécanisme très pertinent, que n’aime pas l’élu : le confier au marché, seul capable de trouver le meilleur coût pour le citoyen, puisqu’il est libre de payer ou de choisir autre chose. S’il existe un avenir compétitif pour le tram ou les bus, le marché saura y répondre. Or aujourd’hui, les citoyens n’ont pas d’autre choix que de se faire polluer leur budget « privé » par des coûts d’investissement et de fonctionnement « publics », loin d’être anecdotiques. Et sans parler de la pertinence des trajets.
Dans la France d’aujourd’hui, osons dire que la meilleure manière de résoudre le conflit entre bouchons et pollution est de laisser les gens choisir, comme en toute chose. Car qui mieux que soi sait ce qui lui est le plus insupportable et ce qu’il est en mesure de payer pour ses déplacements ?
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