(Article originalement publié pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici quelques années après, car il garde je crois son intérêt socio-politico-économique.)
Airbus s’installe aux USA en créant une usine de 1 000 emplois. (Depuis, l’A380 est à la peine…)
La presse française a célébré une victoire pour Airbus face à Boeing ! Mais l’industrie aéronautique toulousaine devrait s’interroger sur une telle implantation en revenant sur les propos de Louis Gallois, qui en 2008 et alors PDG d’Airbus, alertait les pouvoirs publics : « A défaut d’une autre politique "de l’Euro", Airbus se verra contraint de quitter l’Europe pour s’installer dans la zone dollar. » Il ajoutait clairement : « Si cela continue, l’industrie exportatrice fuira l’Europe. C’est la seule réponse à sa disposition pour survivre. » Mais aussi : « Nous allons également accroître le contenu en dollars de nos avions notamment en payant de plus en plus nos fournisseurs en dollars, et en les incitant ainsi à s’installer comme nous, plus fortement en zone dollar. »
Si Louis Gallois avait trouvé un bouc émissaire facile avec l’Euro face au Dollar, il s’évitait de mentionner que le poids des charges et impôts en France ainsi que celui du code du « non-travail » pesaient dans cette décision. N’oublions pas qu’Airbus est née de la volonté artificielle des politiques européens, à coup d’aides et de subventions, de nous doter d’une industrie aéronautique, coûte que coûte. Et Airbus, non seulement aujourd’hui s’installe aux USA pour améliorer sa compétitivité, mais incite ses fournisseurs européens à en faire autant.
Cette installation est donc loin d’être une victoire : c’est l’amer constat que l’Europe, et la France en particulier, ne protègent pas leurs citoyens dans le domaine économique, contrairement à ce qu’elles avancent, et que l’interventionnisme politique dans l’économie finit toujours par le déclin.
Les agitations politiques de ces derniers mois autour de l’industrie en général sont perverses et infondées et n’éviteront pas le départ à terme du reste de l’industrie si des mesures de libération des marchés et d’allègement du code et du coût du travail ne sont pas rapidement prises pour dynamiser l’innovation et la création de richesse. Les manipulations monétaires et réunions sociales ne sont que des illusions : elles ne redonnent aucun travail à ceux qui n’en ont pas !
Pourquoi selon cette même logique ne pas aider Boeing à s’installer en Europe ? Nous aurions au moins l’impression que Bruxelles sert à quelque chose. L’usine d’Airbus aux USA, c’est 1 000 emplois de moins à Toulouse ou à Hambourg... dès aujourd’hui. Combien demain ?
Ne passons pas sous silence que Boeing a licencié plusieurs milliers de salariés ces 10 dernières années, et que cette nouvelle compétitivité du constructeur américain oblige Airbus à s’adapter… par délocalisation aux USA, en s’évitant un plan social. Gageons que les départs des salariés d’Airbus en Europe (retraites, démissions) dans les 10 ans qui arrivent ne seront pas beaucoup compensés, faute de pouvoir faire comme Boeing (licenciements, embauches), et que les nombreux bureaux vides sur la région toulousaine le resteront encore longtemps.
Le Landerneau social nous explique que le protectionnisme permet une plus grande sécurité d’emplois, assure la stabilité des industries nationales, et développe l’État qui le met en pratique...
On constate qu’une telle prétention n’a qu’un temps et que seul le respect des règles de libre échange garantit le développement « durable ». Une fois de plus, chacun pourra vérifier les effets pervers de l’interventionnisme politique : responsables quand il s’agit d’inaugurer avec l’argent des contribuables, pas coupables pour assumer le résultat de leur gabegie.
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