(Article originalement publié pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici quelques années après, car il garde je crois son intérêt socio-politico-économique.)
Au-delà de la mort d’une personne et de son exploitation insupportable par les deux camps dans la violence et la radicalisation, l’affaire du réservoir de Sivens (81) est l’occasion de s’interroger de nouveau sur le fonctionnement des institutions françaises. Lors du débat dans l’apéro politique de votre journal préféré avec un militant du PRG (Parti Radical de Gauche) au sujet de ce réservoir, est apparue la question du respect des règles dans un « état de droit ». Notion si mal comprise.
Concernant Sivens, où sont les règles ? Si l’état suivait des règles de droit claires, comment ce barrage pourrait-il être remis en cause par les politiques eux-mêmes ? Doit-on s’appuyer sur ce que le système politique du département a décidé ? Ou doit-on s’appuyer sur ce que la justice a décidé ? Ou doit-on plutôt suivre ce que les experts, en désaccord entre eux, ont écrit ? Sinon, doit-on suivre les groupes extrémistes ? (Des groupes guère plus extrémistes que les politiques abusant de leur pouvoir avec l’argent du citoyen.) Ou plutôt les propriétaires ? Qui est ce « on », en fait ?
La vraie question : sommes-nous encore dans un état de droit ? Si l’état français respectait les règles du droit naturel au lieu de bâtir un droit positif arbitraire, impénétrable même pour sa justice, nous n’aurions pas ce débat. Mais l’homme politique joue à l’entrepreneur sans les risques, prétendant développer une politique économique, là où en fait, il distribue des faveurs gratuites à des lobbies avec l’argent des autres. Ce réservoir d’eau est-il utile ? Peut-être, mais alors que ceux qui le pensent n’exploitent pas le pouvoir de l’état pour exproprier, mal indemniser les terrains et faire construire le barrage avec l’argent du contribuable. Qu’ils y investissent leur capital propre et assument le risque.
Aucun doute, c’est à ceux qui voient une utilité dans ce projet de s’y lancer et de l’amortir avec la vente de leur production. Voilà ce que serait le vrai droit et le vrai courage, l’honnêteté. Ils ne sont pas propriétaires des terrains ? Qu’ils créent une société commerciale et réussissent à convaincre du succès de leur projet. S’il est si utile, il devrait être aisé d’acheter les terrains nécessaires au projet.
Il y a des opposants au projet ? Soit. Mais vouloir convaincre de l’inutilité du projet n’autorise pas à sortir du droit. Par exemple, s’ils veulent protéger la nature, qu’ils achètent les terrains pour en devenir les légitimes propriétaires, ils auront alors le droit pour eux. Ils sont anticapitalistes ? Soit. Mais qu’ils ne réalisent pas que tout homme est capitaliste ne leur donne pas pour autant droit au recours à la violence. S’ils sèment la violence, qu’ils ne s’étonnent pas de la subir en retour.
L’état français ne respecte pas la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Quand on sort de la neutralité politique pour empiéter sur la propriété privée au nom de causes forcément partiales, on quitte l’état de droit dont on se targue et dont on a pourtant la charge. L’état via ses politiciens ne peut que récolter la violence qu’il crée par ses actes arbitraires. L’état de droit n’est pas, en ce pays.
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