On m’oppose souvent que les « minarchistes » seraient des libertariens et que ces derniers ne se composeraient donc pas des seuls anarcho-capitalistes, ou anarcaps. Quand on sait que le mot « libertarian » a été inventé par Murray Rothbard, l’anarcap par excellence, pour qui « libertarian » voulait dire « libéral radical », ou « pur », sans concession, on sait que cette idée n’a aucun sens ni légitimité et ne peut résulter que d’une confusion de l’esprit ou du sens donné à « minarchiste ».
Or ce mot de minarchiste, selon mon expérience nourrie de fort longues heures de discussion avec certains de ses adeptes, présente deux familles de sens bien distincts. La première est idéologique, ou plutôt théorique : elle théorise qu’une société libre peut et même doit être structurée autour d’un « état minimal », le plus souvent dit régalien, pour être à la fois libre et pérenne. La seconde est politique, certains l’appellent minarchisme de transition : elle consiste à imaginer une société de type minarchiste, c’est-à-dire avec beaucoup moins d’état et bureaucratie, comme une étape tolérable, acceptable sur le sinon long chemin du retour à la véritable liberté qu’est la Libertalie anarcap.
Les deux sens sont forts différents, au point je crois qu’il serait utile, du moins pour les libertariens, probablement moins pour les minarchistes, de différencier les deux par deux mots reconnaissables.
Car il convient de le réaffirmer, il ne fait aucun doute que le minarchisme théorique est une erreur conceptuelle, une aberration théorique sous l’angle libéral et qu’il n’est en aucune manière possible de le voir comme une cible théorique sociale cohérente pour quiconque se réclame de la liberté.
Je propose ainsi de parler de « réductionnisme » pour signifier ce minarchisme de transition trop malencontreusement mal compris et noyé au sein du minarchisme incohérent. En ce sens, Murray Rothbard, mais aussi la plupart des partis libertariens avertis – ce qui n’est pas le cas de tous, hélas – était et sont réductionnistes. Car c’est bien évidemment, il est toujours bon de chercher et de prendre toute forme de réduction de l’état, mais à condition de ne jamais s’en satisfaire et de continuer à exiger de poursuivre l’effort vers la liberté véritable, celle d’une société libérée de l’état.
Avec cette nuance de vocabulaire – ou tout autre qui pourra être préférée, j’espère qu’on pourra enfin éviter d’assimiler minarchiste et libertarien et surtout éviter de confondre un modèle de société sans état et donc libre avec un ersatz de liberté qui n’est que le vague régime amaigri de la tyrannie social-démocratique que nous subissons un peu partout de nos jours.
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