Tuesday, December 5, 2017

Immobilier : une bonne remise à Duflot !

(Article originalement publié pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici quelques années après, car il garde je crois son intérêt socio-politico-économique.)

Vous venez d’hériter d’un capital, disons 300 000 euros (ahhh, les comptes en Suisse…). Comment placer cet argent ? L’immobilier peut sembler une bonne idée et ce d’autant que le gouvernement promet de réduire vos impôts de 18% du montant de l’investissement sur 9 ans. Ça tombe bien, 300 000 euros, c’est le maximum autorisé pour en bénéficier. Parce il y a de telles autorisations…

Génial. Vous allez bénéficier d’une réduction de 54 000 € soit 6 000 € /an ! Mais premier hic : si vous ne payez pas autant d’impôt, cet avantage fiscal n’est évidemment pas si net pour vous. Tant pis si vous n’êtes pas riche : la réduction fiscale, c’est un privilège destiné aux riches. Un riche à plus de 6 000 € d’impôts par an ne payera ainsi son investissement que 246 000 €, alors que le « pauvre » chanceux devra, lui, le payer plein pot : 300 000 € ! Les privilèges du fait du roi n’ont pas été abolis !

Continuons avec les riches, puisque les oligarques en décident ainsi. L’investissement s’accompagne de conditions. Le logement doit être « BBC ». Ne vous inquiétez pas, pas besoin de vous mettre à la télé anglaise. Non, il s’agit d’un « label » énergétique où pour économiser un peu d’énergie, on paie l’isolation au prix fort. Une manière comme une autre pour notre état glouton de récupérer bien vite l’économie fiscale qui vous avait été proposée : n’oublions pas qu’il engloutit aujourd’hui pas moins de 57% du PIB en impôts et taxes. Pour 100 euros produits, hors fraude dite « fiscale », 57 reviennent à l’état ! Il faut bien aller les chercher partout. Quant à l’économie d’énergie, ce n’est pas vous qui en profiterez, ni un membre de votre famille (le dispositif vous l’interdit), mais votre locataire inconnu.

A ce stade, restons avec les riches qui aiment le risque. En effet, inutile d’obtenir des garanties de votre locataire, demandez-lui juste s’il aura un jour l’intention – consciente ou pas – de ne plus payer le loyer en raison de la faiblesse de ses ressources. S’il vous répond positivement, acceptez-le : la condition de location est réservée aux seuls locataires avec des ressources plafonnées. Mince.

Et pour finir, constatons que ce dispositif concerne les seuls riches parfaitement altruistes, ceux qui ne s’intéressent pas au prix du marché et aiment jeter l’argent par les fenêtres. En effet, ne cherchez pas à calculer la rentabilité de votre investissement, vu que le loyer est plafonné à 20% en dessous du marché ! Bon ça y est, vous êtes dans cette catégorie concernée par cet article 199 Novovicies du CGI (Si, si, c’est le bon numéro !) pour profiter de cette « réduction linéaire et égale » ! Je vous devine bien moqueurs, ou tristes, en lisant ce dernier terme. La bonne affaire que vous avez faite là !

Car la mise en location d’un appartement ainsi acquis engendre sa perte immédiate de valeur, de l’ordre de 20%, due à la perte de disponibilité et au risque de maintien dans le lieu d’un locataire défaillant. Votre capital initial de 300 000 euros est réduit de 60 000 euros, ce qui est plus que l’avantage escompté sur 9 ans. Avec l’inflation, votre perte est donc immédiate, puisque hélas l’argent actuel vaut plus que l’argent futur. Sans oublier la bulle immobilière qui éclatera bientôt.

Ce n’est pas tout. La valeur du capital restant dépend de son rendement. Avec une réduction du loyer de 20%, vous dévaluez la valeur initiale du capital du même pourcentage. Votre capital est donc réduit à 192 000 euros (80% de 240 000). L’épargnant tenté par ce dispositif perd immédiatement 36% du capital, soit 108 000 euros, le double de l’avantage fiscal. En cas de revente, ayez bien du courage pour retrouver le capital initial vues l’imposition sur les plus-values et la CSG associée.

Ça y est, les rentiers sont soumis au même régime que les entrepreneurs : la destruction de leur capital. Marx triomphe. Nous sommes bien en république française populaire socialiste ! Comment disait-il déjà ? Ah oui : « Fuyez, pauvres fous ! »

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