(Article originalement publié pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici quelques années après, car il garde je crois son socio-politico-économique.)
Chaque fois qu’à Toulouse on longe la Garonne vers Empalot ou le Canal du Midi vers les Minimes, on peut admirer les chefs d’œuvre d’architecture administrative que sont les hôtels de département et de région. Surtout le bâtiment du conseil général dont les deux menhirs – obélisques ? – à l’entrée évoque la grandiloquence d’un Karnak dont le pharaon aurait plus d’ambition que de moyens… De plus, ces deux ensembles n’en finissent pas de se voir agrandir. Il faut croire que la population qui les occupent connaît une démographie galopante. Avec l’argent des autres, il est facile de s’agrandir.
Bien des « économistes » nous diront que ces travaux de construction et d’agrandissement sont une source importante de croissance et de revenus pour les entrepreneurs locaux. C’est oublier que les fonds qui ont servi à payer ces entreprises ont au préalable été prélevés sur la population qui aurait pu en faire autre chose de plus utile. La croissance n’a donc pas été créée, elle a en fait été usurpée.
Les deux « hôtels » sont habités de fonctionnaires dont le nombre croît en gros avec la surface de bureaux. Il y a peut-être quelques contractuels ou stagiaires, mais ils restent payés avec nos impôts. Là encore, de prime abord on pourrait croire qu’il a croissance par création d’emplois, et c’est d’ailleurs ce qu’exprime le calcul du PIB de nos jours, puisqu’il intègre la « production » publique.
Mais en réalité il n’en est rien, bien au contraire. Par statut aucun fonctionnaire n’a jamais produit la moindre valeur et n’en produira jamais. Les cris que cette affirmation provoquera n’y changeront rien. Pour qu’il y ait valeur et donc richesse, il faudrait d’abord qu’il y ait commerce volontaire. On n’attache en effet de valeur qu’à ce qu’on est prêt à payer. Donc que chaque fonctionnaire produise des produits ou services qui soient spontanément demandés par les consommateurs. Qu’on me cite un seul service de ces collectivités pour lequel M.Dupont serait prêt à payer, spontanément.
On m’opposera que la région comme le conseil général produisent en réalité de nombreux produits et services et sont donc une forte source de richesse collective. Pour appuyer ces dires, leurs sites web vantent leur action dans les domaines du transport, de la culture, l’aménagement du territoire, l’enseignement, la formation et l’écologie. Mais quels services se cachent derrière la propagande ?
Des subventions, des « droits sociaux », des services publics. Les subventions perturbent l’économie, les « droits » perturbent la méritocratie, les deux redistribuent des sommes prélevées sur la richesse justement acquise. Les services publics sont les seuls candidats à une éventuelle valeur, mais qu’en est-il vraiment ? Prenons le cas simple des transports en commun. Seriez-vous prêt à payer le prix de ce qu’ils coûtent vraiment ? Si votre réponse est « non », alors il n’y a ni valeur ni source de richesse.
Mais revenons aux bâtisses. Elles occupent de vastes terrains en plein Toulouse, des terrains qui pourraient rapporter beaucoup sur le marché de l’immobilier. A l’heure de dettes nationale comme locales dignes des plus belles cavaleries financières, il pourrait être astucieux de revendre et libérer ces terrains pour aller vers des espaces moins nobles mais moins dispendieux pour la collectivité.
Rappelons qu’avant la décentralisation voulue par Gaston Deferre en 1982, il n’existait pas de région Midi-Pyrénées et que le conseil général de Haute-Garonne avait un champ d’action bien plus réduit. Cela n’avait pas semble-t-il empêché Toulouse d’être déjà une ville – bien plus – prospère. Depuis 30 ans, au moins la « décentralisation » aura-t-elle permis aux pharaons locaux d’exprimer leurs egos.
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