(Article originalement publié pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici quelques années après, car il garde je crois son intérêt socio-politico-économique.)
L’hiver commence, saison la plus redoutée de tous les petits propriétaires fonciers qui louent un appartement. Celle où il devient impossible d’expulser un locataire, même celui qui ne respecte pas le contrat de location ou ne paie pas. Celle où chaque fois plus de propriétaires décident de ne plus prendre le risque de subir l’injustice, ce qui réduit l’offre et accroît la demande. Cercle vicieux.
En France, il est de tradition gouvernementale d’interférer dans ce contrat liant le locataire à son propriétaire, à l’encontre de tout bon sens économique et juridique. Le logement est bien sûr un bien sensible, majeur pour une vie décente. Il est évidemment souhaitable que tous aient un toit. Et depuis plus de cinquante ans, les gouvernements successifs, droite comme gauche, prennent ce prétexte pour fausser le marché en faveur des locataires, supposés en situation plus précaire. Et de ce fait accroître la rareté et les difficultés à trouver un logement pour ceux qu’ils désirent protéger.
Et notre nouvelle ministre du logement d’emboîter immédiatement le pas à la posture idéologique à la mode, allant jusqu’à évoquer des réquisitions. Si protéger le locataire était efficace, pourquoi depuis ce temps le logement est-il encore un sujet si sensible ? Peut-elle comprendre qu’une telle douche glaciale va raréfier un peu plus l’offre en rendant les propriétaires encore plus frileux ?
Or ne pas payer son loyer est une rupture du contrat à l’initiative du locataire. C’est donc bien lui qui est répréhensible, pas le propriétaire. Pourquoi l’état ne fait-il pas respecter le droit en donnant raison au propriétaire, au lieu du locataire fautif ? Qui prend un risque à construire un logement, souvent avec un crédit ? Qui peut être mis en difficulté face aux échéances qui s’accumulent ?
Mais l’état français est schizophrène : d’un côté il pousse à l’acquisition immobilière à marche forcée via des plans de défiscalisation chimériques et de l’autre il entretient cette vieille image du méchant Thénardier exploitant des locataires pauvres et miséreux. Le pouvoir politique préfère le jugement clientéliste à la moralité douteuse, au lieu de se limiter à un rôle assurant le respect des contrats.
Or si les propriétaires avaient l’assurance que leurs loyers sont protégés, ils investiraient à moindre risque dans l’achat d’autres appartements, pas uniquement pour raisons fiscales. Et par le jeu de la concurrence, les loyers resteraient modérés. C’est aussi simple que cela, le marché laissé à lui-même si la loi se borne à être juste. Si un locataire ne paie plus ou pas son loyer, la seule chose qui doit jouer, c’est le respect du droit de la propriété louée. En obligeant les propriétaires à subir des actes indélicats sans pouvoir compenser par des loyers en hausse, ils disparaissent. Et les logements aussi.
Pour justifier l’intervention étatique, tout esprit chagrin objectera que la logique du marché ne sait pas fournir des logements décents à bas prix. Pourtant, celui qui avance un tel argument est incapable de lui donner la moindre substance, sauf l’arbitraire. Il n’y a aucune raison que de petits propriétaires, aux revenus modestes, ou en général des entreprises, ne décident pas d’opter pour un investissement limité et donc pour une offre de logements bon marché, pourvu que le risque soit en rapport.
Beaucoup ont cette phobie de loyers qui ne pourraient être que trop chers, laissant les pauvres dehors. Or l’existence d’hôtels, de magasins ou de fast-food à prix réduit montre bien que le marché sait aussi aller vers le bas de gamme, sans l’état. C’est un argument sans réalité. Il ne fait que démontrer l’incompétence de nos gouvernants, prompt à oublier qu’ils sont les porteurs des taxes locales (foncière et habitation) venant surenchérir exagérément le coût du logement pour le locataire et le propriétaire. En guise de protection d’accès au logement, rien ne vaut le libre marché.
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