Friday, November 17, 2017

Economie des dictateurs sociaux

(Article originalement publié pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici car quelques cinq ans après, car il garde toute son actualité économico-politique.)

Ce début de mars a démontré une fois de plus combien notre système social supposé le meilleur au monde comporte d’incohérences, illogismes et inefficacités. Les toulousains viennent de subir une grève de plus, celle de quelques dizaines de militants CGT et FO de la galaxie airbusienne et le bilan en est à la fois calamiteux sous l’angle économique et scandaleux sous l’angle moral.

Que des salariés mécontents de leurs salaires ou conditions de travail amènent leur employeur à négocier n’est certes pas condamnable en soi. Une demande collective pour des augmentations toujours individuelles semble par contre assez paradoxale ! En tout état de cause, bloquer ou réduire les accès aux locaux de manière sauvage à des milliers de personnes qui se rendent à leur travail quotidien, donnant ainsi lieu à des embouteillages monstres et un temps perdu inestimable, constitue un chantage inacceptable dans un « état de droit ». Dans une société évoluée, le pseudo-droit d’avoir quelques euros de plus ne saurait bafouer les droits fondamentaux de l’être humain.

Mais sommes-nous toujours dans un état de droit lorsque la violence syndicale est cautionnée par le pouvoir politique via une amnistie parlementaire ? Au pays de l’intérêt général, de quel droit une poignée de syndicalistes non représentatifs peut-elle imposer son intérêt catégoriel à la foule allant travailler en vrai ? Si la grève est à considérer comme un acte ultime de « résistance à l’oppression », un des quatre droits fondamentaux, ce droit n’est pas une caution à nier ces mêmes droits à autrui.

Si le salaire des grévistes est vraiment le plus bas de leur catégorie professionnelle, ils sont libres de trouver d’autres employeurs qui sauront reconnaître leur mérite individuel. En pratiquant la politique de la terre brûlée, obtiendront-ils satisfaction à hauteur de la nuisance portée à autrui ? Leur blocage exerce une vraie oppression envers des innocents ne pouvant rien à leur situation !

Ainsi disons pour que 200 personnes puissent gagner peut-être 250 euros de plus par an, on laisse sans broncher gaspiller sûrement largement plus de centaines de milliers d’euros par un bazar sans nom. J’entends déjà les bonnes âmes hurler à la tyrannie de l’argent ou quelque argument de ce style devant mon raisonnement strictement économique. Mais c’est oublier les arguments de droit et moraux déjà mis en avant. Même en oubliant tout ce gaspillage de ressources et les gains perdus de prospérité, qu’est-ce donc qui peut légitimement justifier de tels actes de violence morale ?

Osons une analogie. Imaginons que des actionnaires d’EADS, incluant les milliers de simples petits porteurs, manifestent et bloquent l’entrée d’Airbus à Blagnac pour réclamer une hausse du cours de l’action et du dividende. Il paraît clair qu’une majorité, à commencer par ces mêmes syndicalistes mais aussi élus et presse, se mobiliserait en criant au scandale. Pourquoi donc admettre le même comportement pour des revendications du même ordre sous prétexte de grève et syndicalisme ?

Ne nous trompons pas, il est légitime que des salariés cherchent à négocier une augmentation – en supposant qu’ils la méritent effectivement par une performance économique accrue liée à leur action mesurable. Mais la grève sincère suppose la pression sur le seul employeur, pas sur le monde extérieur. In fine, ceux en charge du respect du droit ont choisi de ne pas rappeler à ces quelques manifestants qu’ils outrepassaient leurs droits légitimes, empiétant sur le droit de libre circulation des autres citoyens. Cela en contribuant encore à l’appauvrissement général et au délitement de la société.

A quand donc la fin de cette croyance en une sociale-religion désormais dictature ? A quand le retour au bon sens d’une vie en société basée sur l’égalité juste, c’est-à-dire celle devant le droit ?

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