Sunday, December 24, 2017

La technique de la grenouille

(Article originalement publié pour le Journal Toulousain dans la Chronique de Patrick Aubin. Republié ici quelques années après, car il garde je crois son intérêt socio-politico-économique.)

L’énarque n’est jamais à court de fourberies. En voici une qui montre le peu de cas qu’il fait de l’économie : « Si vous plongez une grenouille dans l’eau bouillante, elle hurle et meurt rapidement. Si vous la plongez dans l’eau tiède et que vous chauffez ensuite tout doucement l’eau, son corps s’habitue, son seuil de tolérance augmente et vous pouvez amener l’eau à ébullition sans que la grenouille ne hurle ni ne meurt. ».

Quel rapport avec l’économie ? Eh bien la grenouille, c’est le citoyen, et la température de l’eau, c’est le niveau de fiscalité. Voyez tout le mépris qu’à cette élite pour les fruits du travail de chacun. L’énarque vit grassement de la fiscalité. Sa fonction est pourtant inutile. Oui, vous lisez bien : inutile. Simple : dans votre quotidien, à quelle occasion avez-vous besoin d’un énarque ? Réfléchissez bien. Si vous trouvez, twittez-moi votre réponse (@pataub). Enarques s’abstenir, bien sûr.

Continuons les explications. Jadis, l’Inquisition était très inventive en techniques de torture. Avec la fiscalité, l’énarque met en place des méthodes de torture étonnantes : rien ne rend aussi inventif que l’envie de voler les autres, semble-t-il. Pour un énarque, un « bon » impôt possède des effets de seuils arbitraires permettant d’exonérer une partie de ceux qui doivent être touchés.

Prenons un exemple : à Tournefeuille, le maire (énarque socialiste) a mis en place une taxe facultative sur les enseignes (créée sous Sarkozy, décrétée sous Hollande). Vu le peu d’enseignes dans la commune, les premières estimations donnaient 10 000 euros de recettes. Pourquoi instaurer une taxe qui coûte plus cher à collecter que la recette espérée ? Mystère ?

Non, car comme d’habitude, les estimations de l’énarque se révèlent fausses. A la réception du papier fiscal, la température fut trop haute et les grenouilles hurlèrent… Démagogie oblige, le maire s’est alors fait le chantre du commerce de proximité. Doutons de sa sincérité : il a matraqué ce même commerce avec sa casquette de « vice-président de la communauté urbaine » en charge des finances via la « cotisation foncière des entreprises ». Et là, il s’est empressé de triturer les fameux seuils pour limiter l’impact de cette taxe aux seules grosses enseignes – pour éviter que la sienne soit touchée.

Sauf que le principe étant acté, il suffit que les élus municipaux assoiffés de ressources pour leurs funestes desseins, modifient les seuils peu à peu, en vertu du principe de la grenouille. D’année en année, le nombre de victimes nouvellement touchées ne sera plus jamais suffisant pour représenter une menace au système, mais le commerce local disparaîtra tout aussi progressivement. Extrapolez, et vous avez l’explication de la lente descente aux enfers de la France.

PS : Serge Schweizer a fait tout un travail et un ouvrage sur ce thème, dont un texte dans Libres !! dont je reprends ici un extrait : « Connais ton bourreau » :
« D’abord, nous préférons avoir affaire à des bandits sédentaires plutôt qu’à des bandits nomades (Mancur Olson). La connaissance et les relations qui lient le spoliateur et le spolié permettent de trouver des compromis qui sont plus de l’ordre d’échapper au pire que de maximiser sa satisfaction. Les hommes de l’État se verraient volontiers opérer une razzia fiscale maximale. Mais ils tueraient toute incitation à produire, donc toute possibilité de lever demain l’impôt. De leur côté, les spoliés souhaiteraient garder l’intégralité du fruit de leurs efforts, mais comme leurs persécuteurs ont le monopole de la production du droit et de la violence légale, on préfère acheter une paix relative en étant spoliés en deçà d’un certain montant. »

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