Tuesday, April 26, 2016

Le libéralisme, une autre utopie ?

Je marche ce matin à Montrouge, haut lieu historique de la gôche, et je viens à remarquer un graffiti nous appelant « tous contre l’utopie libérale ». Bigre. Ainsi le libéralisme serait une utopie et on ne m’aurait rien dit ? Tout ce temps passé à lutter pour la liberté serait vain, nul et non avenu 

Une utopie se reconnait dans une vision du monde ou une théorie sociale ou économique qui ne repose en rien sur la réalité des choses de ce monde, ou qui exprime des principes ou convictions qu’une confrontation à la logique ou au bon sens a tôt fait de remettre à leur juste place.

Un des arguments majeurs du libéralisme envers les idéologies concurrentes et étatistes en général tient justement à établir qu’il s’agit systématiquement d’utopies au sens précédent. Ainsi, les idées de gôche et étatistes posent le plus souvent une forme ou une autre de collectivité comme réalité sociale, là où il est en fait impossible de concevoir une collectivité capable de se substituer à l’individu ou les individus qui agissent sous ce voile, pour prendre un des faux concept de Rawls.

Les libéraux sont donc très attachés au principe de réalité qui veut qu’au contraire des utopies, l’individualisme méthodologique qui est à la base de la théorie libérale garantit son ancrage au plus près de notre monde. La théorie économique autrichienne, par exemple, étant axiomatique dans ses fondements, ne peut être remise en cause sans tomber dans une vision artificielle de celui-ci.

Bien sûr, je doute fort que ceux qui ont créé ce graffiti avaient la moindre idée de ces notions. Pourtant, le message m’a alerté et a interpelé certaines de mes certitudes – non, je ne parle pas de convictions en matière de libéralisme, car il n’y a pas de doute quant à la justesse de ses théories.

Et de m’interroger sur une possible utopie du non-pouvoir. On le sait, c’est un sujet largement couvert par des B.de Jouvenel ou C.Michel, au-delà de la disparition de la coercition étatique, ce qui caractérise la société libérale à venir est in fine la disparition du pouvoir politique – donc coercitif. Le principe de la société privée et libre tient dans le remplacement du pouvoir politique par le marché.

Mais on pourrait se demander si, comme la gôche imagine remplacer l’homme par un surhomme parfait qui serait libéré de l’égoïsme et de l’avidité, les libéraux ne tomberaient pas dans l’utopie d’un homme libéré de toute aspiration au pouvoir, question dont je ne nierais pas la pertinence. Mais ce serait ne pas comprendre que le pouvoir « libéral » ne fait que changer de forme : il quitte l’homme politique plus ou moins providentiel pour se fondre à la foule des hommes-libres-consommateurs.

Sunday, April 24, 2016

Rama Yade présidente du PLD ?

Rama Yade vient d’annoncer sa volonté de faire partie de ces quelques prétentieux avides qui croient pouvoir « mener à la destinée de ce pays », selon l’expression consacrée. Ce serait un incident tout à fait mineur s’il n’était accompagné d’un autre : Dans Le Figaro du 21 avril, on pouvait lire que « Rama Yade pourra notamment s’appuyer sur le Parti libéral démocrate pour ce combat politique ».

En premier lieu, je trouve amusant qu’un parti se disant libéral se trouve associé à un « combat politique », concept qui est aux antipodes de toute vision ou ambition réellement libérale. Un combat suppose un affrontement violent, alors que toutes les idées de la théorie libérale reposent sur le principe de non-agression. De plus, se battre pour le politique, c’est se battre pour le pouvoir. Or, Christian Michel en a fait des chefs-d’œuvre, l’idée de liberté est à l’opposé de celle de pouvoir.

Mais peu d’électeurs sans doute sauront voir cette contradiction. Par contre, on peut penser que beaucoup comprendront deux autres choses bien pires pour l’image du PLD et donc du libéralisme – qui n’avait pas besoin de ça en France. La première, c’est que les libéraux voient en cette femme et ce qu’elle représente un porte-parole de la liberté. La seconde, pire encore, c’est que les libéraux ne croient pas suffisamment en leurs idées pour les porter sans l’aide d’une star sur la scène publique.

Or Rama Yade, au-delà de ce qu’elle véhicule comme femme d’origine étrangère ayant réussi, c’est aussi un pur produit de la collusion franco-africaine, avec un père diplomate sénégalais très proche du président Senghor. On peut imaginer mieux pour représenter le libéralisme. Juste pour rire, on lira Wikipedia évoquant « une prise de position en faveur du vote blanc » et bien d’autres turpitudes.

Mais ce n’est pas de Rama Yade qu’il s’agit, mais du PLD qui une fois de plus fait des choix politiciens au lieu de faire son boulot, c’est-à-dire porter fièrement les valeurs de la liberté sur la place publique.

Je reste convaincu que les idées de la liberté ne peuvent in fine porter et être entendues par le peuple qu’en dehors de toute ambition politicienne – on voit bien l’érosion continue et universelle de l’attention populaire dont font preuve les politiciens, ce n’est pas un hasard.

Mais si le PLD doit préférer la voie électorale et partisane, au moins qu’il le fasse d’une manière qui ne laisse pas planer le doute sur ses intentions véritables. Tant que le PLD jouera le jeu de l’entrisme et des associations douteuses, il contribuera plus à nuire au libéralisme qu’à le servir en lui donnant l’aspect de ce que précisément le libéralisme se veut mettre à bas : la démocratie et le jeu politicien source d’injustice.

Tuesday, April 19, 2016

« La démocratie, c’est le débat. » Vraiment ?

Ce matin, comme c’est la mode ces jours-ci, on évoque Nuit Debout dans la presse et l’agression d’Alain Finkielkraut, laquelle conduit à cette affirmation supposée rassurante quant au respect des idées et notamment celles du philosophe : « La démocratie, c’est le débat ». Débattre, c’est bien.

Qu’est-ce que débattre, au fait ? Ou plutôt, que cela suppose-t-il ? Débattre, librement, c’est en effet exprimer, concrétiser la liberté d’expression de chacun, chose incontestablement positive et majeure pour la liberté de tous. Débattre, c’est permettre à la liberté d’être comprise, exigée, sinon trouvée.

Mais surtout, débattre suppose que la chose débattue n’est pas un sujet clos, une question dont la ou les réponses ne sont pas encore connues. Débattre c’est donc chercher ce qui n’est pas connu.

Bien évidemment, la part d’inconnu dans une démocratie est immense, elle le sera toujours et c’est très bien comme cela : le futur est largement inconnu, c’est l’expression même de notre liberté.

Il y a pourtant des pans entiers de la vie en démocratie qui ne sont pas, qui ne sont plus inconnus et cela depuis fort longtemps – au moins depuis que les économistes autrichiens sont passés par là. Et pour tous ces sujets, fort nombreux, quand on écoute les fameux débats, eh bien, il n’y a pas débat.

Prenons quelques exemples pour illustrer. La lutte contre le chômage ? Pas besoin d’en débattre, on sait, depuis Frédéric Bastiat sinon avant, que la suppression du salaire minimum et de l’essentiel du code du travail suffiraient à le rendre quasi-inexistant. Les 35 heures, ou même les 32 heures comme on commence à entendre – c’est-à-dire le partage du temps de travail ? Pas de débat non plus, c’est le fruit d’une confusion profonde entre travail et emploi qui rend l’idée sans fondement. Le travail existe et existera à l’infini car il est l’expression des besoins et envies des hommes. Infini, pas besoin donc de le partager. Par contre, les 35 heures, c’est produire moins pour le même revenu sans gains de productivité : pas besoin de débattre pour établir que cela ne peut que nous appauvrir.

Ce ne sont que quelques exemples, il y en a autant que l’on veut. Ce qu’il faut en retenir, c’est que la vie sociale ne repose pas entièrement sur le relativisme, tout n’est pas affaire de choix politiques. Il y a des lois économiques intemporelles et universelles auxquelles nul politicien ne peut échapper, pas plus que la démocratie ou la volonté du peuple. Dès lors, débattre reste une excellente chose, mais à la lumière du réalisme économique et des obligations morales issues du respect du droit par chacun.


PS : Voir cet ancien article sur le même sujet, en plus détaillé : https://www.contrepoints.org/2011/03/09/16374-de-lillusion-democratique

Saturday, April 16, 2016

Mouvement des citoyens financé(s)

Les mouvements citoyens sont à la mode. C’est sans aucun doute un signe positif du ras-le-bol politique croissant et a contrario de l’essoufflement du système politique social-démocratique. Nuit debout fait le sitting à la République, Jean-Marie Cavada se croit porte-parole des citoyens, et jusqu’à Emmanuel Macron qui y va de son mouvement, comme si chasser l’immobilisme faisait le politique.

On ne manquera pas de remarquer que les mouvements prennent surtout de la vitesse au moment où la vie politique se prépare à ne tourner qu’autour de la prochaine élection présidentielle. On objectera sans doute que cela est fortuit, qu’il s’agit en réalité d’une saine expression populaire en réaction à quatre longues années de minables errements de la part de François « Flamby » Premier.

C’est probablement vrai en partie, mais il me semble qu’il convient de rester vigilent en posant très clairement la question du financement de tous ces groupuscules. En effet, n’oublions pas que la loi prévoit désormais le financement des partis politiques, sous les faux prétextes de préservation de la diversité des opinions et d’égalité des chances et d’exposition desdits partis devant les électeurs.

Ce mécanisme est en réalité fort injuste et je m’étonne que les chantres de la justices sociale soient si peu bavards sur ce point. Pourquoi faudrait-il en effet que les impôts financent les campagnes de ceux-là mêmes qui espèrent nous taxer encore plus en vivant de cette manne ? En toute logique, ce devrait être à chaque candidat de s’autofinancer : les taxes ne financent pas la pub à la télévision.

Il y a deux ou trois ans, mon ami Alain Toullec avait l’idée d’un label, le label Bastiat, qui récompense toute entreprise, association ou projet qui n’aurait aucun recours d’aucune sorte aux subventions, par définitions publiques et produits de l’impôt. Le Mouvement des Libertariens et l’Institut Coppet ont reçu ce label, preuve pour le premier qu’il est possible de faire campagne sans argent sale.

On pourrait imaginer reprendre l’idée et la généraliser à tous les partis. Il n’y aurait probablement aucun lauréat digne de Bastiat, mais ce serait probablement une occasion de sensibiliser l’opinion à l’un des grands travers de la vie publique en France. Imaginez un jour un parti dont aucun membre, aucun bien, aucun élu ne serait financé par autre chose que des dons et ses propres deniers. Vous y voyez un risque de corruption par le privé ? C’est oublier que le privé ne fait fortune que grâce à votre commerce et qu’il ne peut durer longtemps contre votre volonté, contrairement à l’étatisme.

Wednesday, April 6, 2016

Panama papers – Paradis la sortie ?

Voilà que nous arrive une espèce d’affaire Snowden, mais en plus croustillant. Une fuite nous révèle – ô surprise – la réalité patrimoniale de nombreux politiciens ayant mis au chaud le fruit de leur dur labeur, et cela suffit à émouvoir ceux qui n’ont les moyens que de s’offrir l’enfer fiscal national.

Et toute la presse de tomber une fois de plus sur les paradis fiscaux, Panama cette fois, cela change.
Mais ce n’est que manifester une myopie qui décrédibilise un peu plus les médias que de limiter les analyser à ce rideau de fumée. Ce n’est bien sûr pas des paradis fiscaux qu’il convient de s’émouvoir.

Non, clairement il n’est pas choquant que quiconque cherche à faire fructifier son patrimoine et à éviter qu’il soit injustement réduit de taxes toujours inutiles et arbitraires. Ce qui est choquant, c’est d’une part l’origine des sommes concernées, venant pour les politiciens de nos impôts, et ensuite la personnalité des « victimes », qui précisément sont très souvent les premières à donner la leçon.

Les sommes mises à jour sont scandaleuses dès lors qu’elles sont « privatisées » alors même que leur origine est « publique ». Les taxes et impôts sont fondamentalement du vol ; voilà qu’en plus ce vol profite à certains privilégiés au lieu de financer les soi-disant services publics qui visent à les justifier.

Et le scandale empire quand ces privilégiés entrent dans cette catégorie même des politiciens qui se veulent exemplaires et dévoués à la juste cause de notre intérêt général – mais qui veillent bien à ce que celui-ci commence avant tout par leur intérêt propre – enfin, « propre » est une façon de parler.

Les paradis fiscaux sont un de ces mythes cache-sexe des socialistes qui visent à faire de l’homme une perfection arbitraire et hors de toute réalité. Ici, on n’arrive pas à juguler « l’évasion » fiscale et donc on condamne ceux qui en sont l’expression, alors que c’est la fiscalité qui est le problème réel. 

Cela revient à tuer le messager quand on ne veut pas accepter la vérité du message. Bonne nouvelle, les « Panama papers » révèlent à quel point les enfers fiscaux sont un enfer, même pour les diables.

On peut conjecturer à l’envi sur l’impact que cette affaire va avoir. Il est probable que nous allons voir une de ces vagues régulières de levée de boucliers contre les « paradis fiscaux ». La logique voudrait pourtant que ce soit contre les hommes politiques et leurs fortunes abusives et immorales que la presse et l’opinion se lèvent. Espérons que ceux-là s’en sortent sans l’emporter au paradis.

Tuesday, April 5, 2016

Les sociétés multiculturelles ont-elles un avenir ?

Depuis mai 68 et de plus en plus, il est à la mode d’être tolérant et accueillant, et 50 ans plus tard, un peu partout dans les pays occidentaux, on se demande souvent dans le métro ou ailleurs si on habite bien encore dans son propre pays… Plus encore, la culture locale a laissé le pas et ne va plus de soi.

Avec la démocratisation des voyages et la simplification des télécommunications, allons-nous vers une – ou des – sociétés où toutes les cultures seront de plus en plus à la fois entremêlées et disjointes, où tout serait comme si plusieurs pays – à l’ancienne mode – évoluaient dans un seul ?

Il sera toujours impossible de prévoir l’avenir et je ne prétends pas lire dans une boule de cristal. On peut cependant imaginer divers scénarios, selon la lecture qu’on a de l’évolution de la société. Un décroissant imaginerait sans doute quelque crise qui ne me viendrait même pas à l’idée. Pour ma part, je reste convaincu que la démocratie et son socialisme vont très bientôt à leur perte et que les « empires » occidentaux vont peu à peu éclater, comme l’URSS le fit il y a une trentaine d’années.

Laissant la place à de petits territoires rénovés, libres ou du moins plus libres, peut-être au point pour certains d’être très proches de l’idéal libertarien, comme le Liberland par exemple, un premier phénomène va immanquablement jouer. Les habitants de ces petits pays auront repris le pouvoir de décider de leur vie et notamment de choisir les membres de leur communauté, selon les critères de leur choix. Cela va forcément pousser les personnes d’origine étrangère à une alternative : partir ou se fondre, se faire accepter, si ce n’est pas déjà fait. Et c’est là la question que je crois intéressante.

Car on peut alors imaginer une infinité de situations. Il y aura ces Sénégalais, noirs parmi des blancs, qui seront déjà parfaitement chez eux, porteur d’une autre culture tout en respectant la liberté et le droit de leur nouvelle ville. Il y aura ces blancs restés adolescents qui se feront chassés de partout. Il y aura des villes blanches, des villes noires, des villes cosmopolites. Peu importe, si le droit et la liberté se trouve y être respecté et si chaque communauté trouve in fine son équilibre relationnel.

La question n’est pas tant celle de la culture que celle du droit. Car si les sociétés multiculturelles font question aujourd’hui, c’est parce que le droit de base de chacun n’y est pas respecté, plus que par haine ou que sais-je. Un immigrant quel qu’il soit ne doit pas chercher à imposer ses traditions et sa lecture du droit à ceux qui l’accueille – pourvu que le pays qui l’accueille le respecte de même. C’est aussi simple que ça, le problème du multiculturalisme. Ce n’est pas un problème de culture en fait

L’avenir des sociétés issues de la période démocratique occidentale, s’il repose sur la liberté comme je l’espère et l’appelle de mes vœux, sera aussi multiculturel, peut-être même encore plus. Mais il ne sera pas celui de ces traditions qui, de tous bords, même catholique, ne respectent pas le droit.

Monday, April 4, 2016

Les mythes de la démocratie et de la décroissance (2)

Reprenons l’analyse des soi-disant principes proposés par « Démocratie Directe & Résilience ».

Leur second « principe » est exprimé comme suit : « Affirmer l’interaction entre la liberté et l’égalité : La liberté est une valeur fondamentale pour l’individu. L’égalité est une valeur fondamentale pour la collectivité. Ces deux valeurs président à la fondation de la Constitution et sont interdépendantes. Le champ de l’une pouvant réduire le champ de l’autre, la constitution s’efforce de garantir un juste équilibre entre les deux. » S’il est positif de voir ces deux thèmes, surtout la liberté, abordés, on reste dans l’à-peu-près et l’incohérence tout au long de cette affirmation. Commençons avec la liberté.

La liberté n’est pas une valeur. Une valeur est quelque chose à laquelle individuellement on croit et qu’on adopte, le plus souvent parce qu’on y voit une dimension morale et sociale positive. Or la liberté n’est pas un choix individuel, même si elle est affectée par les choix de tous et chacun. La liberté est un produit, un résultat, celui du respect du droit par chacun. Elle peut être une aspiration personnelle, mais si on veut une valeur, ce sera plutôt celle du respect de l’autre et du droit d’autrui.

L’égalité est certainement plus une aspiration, en effet, mais elle ne peut de toute façon l’être qu’à titre individuel et non collectif. Et encore faut-il s’accorder sur ce qu’égalité veut dire. Celle qui est sur nos frontons du moins n’a de sens que si elle va de pair avec la liberté, c’est-à-dire qu’il s’agit de l’égalité de tous face à l’obligation sociale de respecter le droit et de voir le droit respecté par autrui.

Avec de telles définitions, égalité et liberté ne sont jamais en conflit, contrairement à ce qui est dit. L’égalité ne vient « réduire le champ » de la liberté que lorsqu’on parle d’une égalité qui s’impose à autrui, comme pour la soi-disant égalité sociale, ou la fausse égalité forcée des genres et des races. Mais cette égalité n’a aucun sens réel, elle qui se définit en opposition du bon sens et de la morale.

Dès lors, une fois de plus, on comprend que la constitution, vue comme source nécessaire d’équilibre entre liberté et égalité, perd une fois de plus ses raisons d’être. On comprend aussi combien il est facile de falsifier le sens des mots et nous vendre de séduisants concepts comme illusions de liberté.

La liberté fait l’objet de nombreux masques, on la déguise de bien des façons. La préserver passe par une attention particulière aux sens des mots qui viennent à la déguiser ou à la corrompre. A suivre.

Friday, April 1, 2016

Les mythes de la démocratie et de la décroissance (1)

J’ai découvert il y a peu le « groupe de citoyens ordinaires » qui se fait connaître sous le nom plein de promesses de « Démocratie Directe & Résilience ». A les lire, on perçoit un mélange détonnant entre des minarchistes inconscients et des décroissants dégoûtés du socialisme – plutôt une bonne chose.

Voir un tel mouvement se créer, c’est avant tout positif et encourageant. Car même si leur analyse et leur programme sont truffés d’incohérences, parfois majeures, comme toute vue politique éloignée de l’anarcapie, il demeure que toute poussée inspirée par la liberté fait avancer le débat en ce pays.

Mais il reste que leur positionnement politique est une impasse faite d’incohérences et d’analyses approximatives. Cela ressort aisément de l’analyse de leur « fondements » et « principes », repris de leur site web. Sur plusieurs articles thématiques à suivre, voyons ce qu’il en est vraiment, en débutant par le premier principe, qui concerne le rôle de la constitution, un thème très démocrate.

Attention, cela part fort : « L’homme trouve la nécessité d’établir un contrat social à partir du moment où il décide de quitter son état naturel d’individu « libre devant la nature » pour entrer en « collectivité organisée ». » C’est digne d’un sujet de philo du bac made in éducation nationale.

L’idée générale n’est pas idiote : en langue plus simple, on pourrait traduire par : « l’individu devient adulte en reconnaissant le droit comme base de la vie sociale », en donnant une lecture libérale. Mais parler de contrat social, nécessaire ou pas, n’a aucun sens pour bien des raisons, par exemple parce le concept suppose plusieurs signataires alors qu’on s’intéresse à l’individu qui seul décide.

Plus gênante, la notion de liberté devant la nature. C’est un contre-sens. Etre « naturellement » libre, cela serait pouvoir voler ou respirer dans le vide de l’espace, par exemple ? Non bien sûr. La liberté se rapporte à autrui, à nos droits mutuels, c’est l’article IV de la déclaration des droits de l’homme.

Ensuite, voilà le principe lui-même : « Ainsi, le rôle premier d’une Constitution est de définir clairement les notions de domaine individuel et de domaine collectif, afin de pouvoir circonscrire le champ de la loi à l’intérieur de chaque domaine. » Deux ou trois questions simples pour illustrer le vide de cette phrase : A qui appartient le domaine collectif ? Qui décide du champ de la loi ? Et de la loi ? Pourquoi a-t-on besoin d’une règle pour faire des lois sans savoir pourquoi on a besoin de lois ?

Ce n’est qu’un premier aperçu, nous verrons les incohérences des principes suivants. Retenons à ce stade qu’une constitution n’est jamais le gage d’une société libre : elle exprime le pouvoir d’imposer des lois inutiles accordé à un collectif mal défini envers des individus libres n’ayant rien demandé.