Les constitutions de ce monde
prétendent garantir la liberté de leurs pays respectifs. Pourtant leur échec
est patent. Il suffit de considérer le nombre de démocraties constitutionnelles
qui sont autant de tyrannies pour s’en convaincre – sans même discuter de
l’illusion de liberté de la démocratie.
Il y a deux erreurs
conceptuelles profondes sous-jacentes à cet état de fait. En premier lieu, on
attend des constitutions qu’elles organisent le pouvoir politique, notamment par la représentation et la séparation des pouvoirs,
alors que la liberté suppose l’absence de pouvoir : elle suppose la pleine
responsabilité de l’individu, c’est-à-dire précisément l’inverse. Ensuite, le
concept de constitution dérive de celui de contrat social où paradoxalement
aucun contrat n’existe qui serait signé et donc formellement accepté – ou
rejeté – par les individus concernés et censés le respecter.
Retournons dès lors la
logique et faisons d’une constitution libérale un véritable contrat, dûment
signé, engageant mais également révocable par chaque citoyen. Signer signifie pour le celui-ci qu’il reconnaît deux
choses : l’entité avec laquelle il s’engage et les termes de cet
engagement. Cela suppose aussi que l’entité peut de même révoquer le contrat, selon
les modalités prévues bien sûr. Ce qui signifie qu’un citoyen peut être
« déchu de sa nationalité », selon un terme hollandien.
Une constitution comme on les
connait concerne et suppose un pays, un état, une collectivité donc, dont le
citoyen serait comme le locataire, ce qui conditionne l’objet du
« contrat ». Dans l’hypothèse libérale, il y a d’autres cas
possibles. L’entité signataire peut tout d’abord être un individu qui serait
propriétaire d’un territoire au sein duquel on souhaite vivre. On a alors affaire
à une monarchie libérale, où le monarque se positionne comme un opérateur de
service, de manière analogue à un propriétaire qui loue ses locaux et services
à une entreprise qui s’y installe.
Les questions de pouvoir dans
ce cas sont simples. Pas besoin de se poser de question complexe en matière de
vote, séparation des pouvoirs ou autres chambre haute ou basse. Le simple jeu
de la concurrence suffit à régler toutes ces questions, puisque le seul pouvoir
en jeu tient à la satisfaction ou non du client – et du prestataire monarque.
Le citoyen mécontent ou qui considère son monarque incapable ou trop intrusif
peut à tout moment aller voir ailleurs et « voter avec les pieds ».
L’entité peut aussi être un
collectif qui de même serait propriétaire du territoire concerné. Noter que
cette propriété, comme toute propriété, peut être contestée, scindée, accrue en
territoire par acquisition ou échange, tous cas de figure qui seront abordés
dans le contrat signé. Quoi qu’il en soit, deux cas à nouveau se présentent. Le
plus simple voit le citoyen n’être qu’un locataire, de façon analogue au cas
précédent. On a affaire à une oligarchie libérale, semblable à une monarchie.
Le cas le plus intéressant
correspond à un citoyen copropriétaire, c’est-à-dire une organisation où tous
les citoyens sont directement « au pouvoir », sans représentant ni
intermédiaire. Selon leur propriété relative, comme des actionnaires ayant plus
ou moins de parts, certains seront plus influents que d’autres. Néanmoins
chacun dans un tel cas à un droit irrévocable et homogène de décision. Là
encore, les questions classiques de séparation des pouvoirs ne se posent pas,
car elles n’ont simplement pas d’objet.
L’analogie avec
l’actionnariat des entreprises est évidente et peut être une source pertinente
d’analyse. De nouveau, on a principalement deux cas : la grande
entreprise, où l’actionnaire est souvent anonyme, et la petite entreprise où
chacun ou presque se connait. Je passe sur la petite entreprise où la
gouvernance va de soi. Dans la grande entreprise, on le voit tous les jours, il
peut se former des coalitions entre actionnaires qui finissent par concentrer
le pouvoir de décision entre un nombre réduit de mains. On arrive alors à une
situation peu éloignée de ce que nous connaissons aujourd’hui et beaucoup
pourront objecter que justement, c’est bien ce qui fait problème.
Pas tout à fait cependant,
car une grande différence demeure : la liberté de sortie, qui n’existe pas
dans nos sociétés dites démocratiques et pourtant avant tout tyranniques pour
cette raison précise. La liberté de sortie fait que le citoyen qui considère
que sa liberté n’est pas assurée peut toujours résilier le contrat et opter
pour une autre entité, un autre territoire. Cette mise en concurrence fait que in fine, comme sur tout marché, un
équilibre dynamique et fluctuant se met peu en place entre les entités trop
grandes et d’autres de tailles réduites. Emerge alors une foule de micro-pays
libres.
On comprend ainsi que la
tendance sera de tirer peu à peu la taille des entités, des pays donc, vers le
bas par rapport à ce que nous connaissons à ce jour, afin de permettre à chacun
citoyen de se faire entendre au sein de territoires assez grands cependant pour
être connus et reconnus sur le marché. Demain peut-être aurons-nous en France
autant de pays libres que de villes ou de communes ?
On le comprend, il n’est pas
besoin de constitution pour assurer notre liberté. Il suffit juste que les
territoires aient tous des propriétaires reconnus comme tels par le marché des
pays et des citoyens, puis de laisser fonctionner ce libre marché. Encore une
fois, la liberté, c’est toujours simple.
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