Monday, March 6, 2017

Privatisation de la collecte de l’impôt

Le concept a fait du bruit à plusieurs reprises dernièrement. Ainsi, l’annonce de la « privatisation » des radars de contrôle de vitesse a laissé entrevoir l’explosion des amendes. Plus ancien et sans égal dans le gaspillage, l’affaire EcoTaxe et son consortium de collecte par portiques a largement fait les manchettes ces dernières années. Il y a sans doute d’autres exemples, mais ces deux-là au moins posent la question de la privatisation comme voie supposée royale de la libéralisation sociale.

Ce phénomène n’est pas nouveau, l’idée de privatiser la collecte des impôts et taxes pour la rendre plus « efficace » n’a pas attendu le XXIe siècle pour surgir. Les exploiteurs ont toujours de bonnes idées pour faire croître leurs profits. Ainsi, au Moyen Âge, les prévôts, baillis ou sénéchaux étaient à divers degrés des professionnels de la collecte d’impôts payés par le roi, mais aussi en se servant directement dans la manne prélevée en son nom, ce qui ne fut pas sans créer des exactions.

Car la corruption va de tous temps de pair avec l’impôt et par exemple : « Sénéchaux et baillis n'ont pas fait disparaître les exactions que l'on reprochait aux comtes est prévôts. La nécessité apparaissait donc d'organiser une surveillance plus soutenue de l'activité des collecteurs d'impôts. »

Il me semble qu’il y a derrière ces émotions une confusion quant au rôle de la privatisation. Face au « public », ou à la nationalisation, les libéraux ou ceux qui parlent en leur nom opposent en effet souvent le « privé », et par extension la privatisation. Au « mal » que serait le public, il suffirait donc de substituer le « bien » du privé pour que la liberté revienne ainsi que sa prospérité promise.

Les discussions en matière de liberté montrent que beaucoup se laissent prendre par le piège de la confusion entre fonction et organe, et c’est le cas ici encore. Reprenons le cas des radars pour être concret. Confier la gestion ou la collecte des radars, de leurs « flashes » et de leurs amendes à une entreprise privée a effectivement toutes chances d’être plus efficace que ce même rôle laissé à une institution publique, le « privé » étant indiscutablement plus motivé à être efficace que le « public ».

L’organe, l’organisation qui s’occupe des radars, sera donc meilleure, le privé ne peut pas être remis en cause dans son efficacité. Mais bien évidemment, le problème que nous ressentons tous vient de la fonction, c’est-à-dire des radars eux-mêmes, qu’ils soient publics ou privés. En l’occurrence, on préfèrera qu’ils restent publics, car c’est l’espoir de nous voir moins souvent flashés que par le privé.

Cette question de la collecte privée des taxes et impôts qui montrerait que le privé ne règle pas les problèmes, voire même les accroît, est donc une mascarade. La privatisation est toujours une source de plus grande efficacité. Mais elle n’est pas pour autant toujours une garantie de liberté. Pour que vienne la liberté, il faut que la privatisation porte sur une fonction qui ne soit pas en elle-même une perte de liberté, ce qui exclut la collecte d’impôts ainsi que tous les autres monopoles étatiques. Autrement dit, il faut cesser de parler de privatisation, pour lui préférer la libéralisation. De tout.

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