De nos jours, la vie en grande entreprise est riche de
surprises – c’est probablement pour cela que ça rime… On y rencontre plein de
« cadres-sups » bobos, chacun le symbole parfait de ce capitalisme
sauvage qu’on se complait à dénoncer. Et pourtant qui se révèlent si souvent
quand on les côtoie les plus parfaits gauchistes incultes et intellectuellement
intoxiqués qu’un libéral peut imaginer.
Ainsi il y a quelques jours, lors d’une discussion informelle
sur les enjeux du « big data », un des plus roses de mes collègues
« cadre-sup » nous fit don d’une tirade dont le ton ne laissait aucun
doute quant à la conviction qui la motivait. Selon lui, les « GAFA »
se permettaient des postures et des décisions totalement intolérables et
illégitimes, et il était clair que seul l’état a légitimité à ses yeux.
Retour arrière, que sont les « GAFA » ?
Google, Apple, Facebook et Amazon, pour les intimes. Ces grandes entreprises
qui mènent symboliquement la transformation de ce monde vers la liberté d’un
monde plus « numérique ». Elles cristallisent sous ces quatre lettres
la haine de tous ceux qui voient en elles les nouveaux maîtres d’un monde
qu’ils ne comprennent pas et dont ils ont peur.
Et que reproche mon bobo aux GAFA ? Eh bien selon lui,
Mark Zuckerberg, patron de Facebook, n’a pas la légitimité ni même le droit de
se mêler de certains sujets comme par exemple la détection de « fausses
informations », récemment. Mais plus largement encore, il y a aussi
l’affaire Apple contre FBI touchant la protection des données des clients
d’Apple et la sécurité de ses téléphones.
Autrement dit, notre ami considère explicitement que les « GAFA »,
et au-delà de ces symboles, les entreprises en général, n’ont pas la légitimité
pour se mêler de sujets sociétaux, lesquels seraient donc l’apanage exclusif du
domaine politique et des élus de la démocratie représentative. Erreur.
Il illustre en fait toute l’erreur d’analyse que font les
socialistes et les démocrates, celle qui voudrait que la seule légitimité
sociale ne serait que politique, que seul un vote, même un vote tous les 5 ans,
même d’ailleurs l’absence de vote du fait de l’abstention, peut donner
légitimité à agir pour le bien commun. Je ne chercherai même pas à discuter de
la vacuité de ce concept, je me contenterai de montrer qu’il y a une autre
source de légitimité dans une société libre, et qui est bien plus forte.
Il s’agit du vote par l’acte d’achat, par le libre échange.
Que faisons-nous en effet chaque fois qu’on achète un produit ou un service,
chaque fois qu’on va sur Amazon par exemple, pour revenir aux GAFA ? On
exprime la libre opinion que ledit produit ou service nous convient plus que d’autres ;
que pour le prix qu’il nous coûte, c’est le choix qui nous semble le meilleur. Et
comme pour un vote, on aurait pu s’abstenir d’acheter, ce qui serait aussi un
signal pour l’entreprise concernée. Acheter est donc identique à voter :
on fait un libre choix, au vu des caractéristiques du produit – un programme.
Mais l’acte d’achat va bien plus loin que le vote
traditionnel. Car on achète bien plus souvent, donc les entreprises qui
réussissent sont celles qui ont réussi à recueillir le plus de votes. Dans le
cas des GAFA, ces votes élémentaires ne s’expriment pas comme en politique en
millions, mais en milliards. Les GAFA et les entreprises en général sont donc
porteuses d’une reconnaissance par le marché qui est sans commune mesure avec
le meilleur politicien qui soit. Et de plus, les GAFA ne nous imposent rien,
nous sommes libres de les faire disparaître : il suffit de les boycotter. Cela
arrive tout le temps.
Avec cette nouvelle idée de la légitimité, imaginez un instant
que les entreprises, les assurances par exemple, commencent à s’occuper de
notre sécurité, du terrorisme. Il serait très facile de voir si elles font bien
leur travail : leur légitimité viendrait de leur succès économique, s’il
devait se confirmer.
On verrait alors que la légitimité du vote classique est bien
moindre que celle de l’appareil de la liberté.
2 comments:
Je conteste à quiconque de sélectionner les informations à ma place. Même Zuckerberg. Il répond là à une pression politique.
Mais cher Vladimir, nous sommes d'accord, ce n'est pas l'argument. Même quand il prétend filtrer ou pas, Mark ou quiconque ne fait qu'offrir une option à ses lecteurs, qui restent libres de chercher d'autres sources qui seraient peu / pas / autrement filtrées. On reste bien dans le marché libre de l'information, tant que ce marché laisse la place à d'autres. Ce n'est de toute façon pas le sujet ici.
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