Cet article
est la suite d’un premier papier de cette série que je lance sur l’analyse du
livre de J.Cheminade traduit de Lyndon LaRouche, supposé être sa bible en matière
d’économie, qu’on peut trouver ici.
On verra plus
bas que la théorie développée passe par un modèle qui considère l’homme comme
une ressource comme une autre et se focalise sur la recherche de l’optimum
industriel, comme si c’est cet optimum là qui comptait dans la vraie vie. On
reproche souvent au libéralisme d’être matérialiste, ce qui faux car il est
justement centré sur l’action et les besoins de l’individu, et par contre on
vient modéliser l’économie de manière totalement physique, matérielle, comme s’il
était possible de ne voir en l’homme ou en la société qu’une machine
thermodynamique. Ridicule marque d’absence du plus simple bon sens.
Ce premier
chapitre est censé établir les bases théoriques de la vision économique de JC –
et de son ami Bruno Lardoux. Comme pour le premier article, et je pense toute
la suite à venir, je vais commenter point à point, paragraphe par paragraphe –
ou blocs – avec l’original dans le texte, de manière à permettre au lecteur de
juger et de suivre.
Je présente a
l’avance mes excuses au lecteur, c’est très long, mais bon….. On y va…
« Le trait
caractéristique de la machine à combustion est la relation fonctionnelle
existant entre l’accroissement de puissance fournie à de telles machines et
l’accroissement du pouvoir des ouvriers à accomplir un travail. A partir de
l’examen de cette relation fonctionnelle, Gottfried Leibniz (1646-1716) a
défini les notions de puissance, de travail et de technologie au sein même de
la Science Physique. »
Cela commence
fort, et déjà nous sommes face à une mécompréhension. L’accroissement de la
puissance des machines n’a pas accru le « pouvoir » des ouvriers.
Aucune technologie apparue depuis n’a accru le « pouvoir » de
quiconque.
Il est d’ailleurs
tentant de se demander si ce n’est pas une mauvaise traduction de « power » qui ici signifierait « puissance »
(au sens physique) et non « pouvoir » (sens politique). La
technologie n’a aucun impact politique. Elle n’a qu’une seule conséquence immédiate
et économique : elle accroît le rendement et donc la productivité de la
main d’œuvre. A plus long terme, elle contribue à voir les salaires augmenter –
et non pas baisser, comme on le croit souvent.
« L’étude de
cette relation fonctionnelle, étendue à partir du cas spécifique de la machine
à combustion à tous les autres aspects du processus de production, constitue le
sujet de l’économie physique. L’économie physique est une partie intégrante de
la Science Physique prise dans son ensemble ; l’étude de l’économie politique,
constamment gouvernée par les principes de l’Economie Physique, est la science
économique. »
Là, nous
entrons dans le vif du sujet, mais pour accoucher d’un monstre. La notion d’économie
« physique » est en effet vide de sens. Il n’y a pas une économie X
et une autre Y. L’économie est la science de l’action humaine – on parle aussi
de praxéologie – et il n’y a pas d’un côté l’économie physique et l’économie
politique, car elles n’auraient alors aucun sens. L’auteur se garde d’ailleurs
bien de les définir.
L’économie n’est
pas non plus une partie de la science physique. La science physique est expérimentale
et s’intéresse aux lois de la matière. L’économie ne traite que de l’homme, en
action, et celui-ci, même s’il est bien sûr soumis à la physique, ne décide pas
de ses actions selon la gravitation ou le magnétisme, mais selon sa volonté,
son libre-arbitre. De plus, alors que la physique repose sur des expériences
reproductibles, il n’en est pas de même en économie. La vie bouge, change,
constamment. On n’est jamais deux fois exactement dans la même situation dans
une société. Espérer bâtir la science économique par l’expérimentation est donc
sans espoir. L’économie est pourtant une science, mais grâce à la logique.
« Le contexte
pratique du développement par Leibniz de la science économique était son
intention de révolutionner l’exploitation minière, les manufactures et le
transport fluvial par l’emploi généralisé de machines à vapeur au charbon. Le
collaborateur de Leibniz, Denis Papin (1647-1714), a été le premier à
développer une machine à vapeur efficace, qui a propulsé efficacement un bateau
sur une rivière [1]. Leibniz expliquait que le développement de la production
industrielle par des machines à vapeur alimentées au charbon exigeait une
amélioration qualitative dans l’exploitation des mines de charbon et de fer.
Cette amélioration impliquait l’application de la machine à vapeur à des
exploitations minières, telles le pompage de l’eau, comme condition préalable à
l’application des potentialités du charbon à la production industrielle. Cela a
été le cœur du programme économique que Leibniz a fourni à la Russie de Pierre
1er ; c’est pourquoi la Russie a progressé au point que son rythme de
développement minier et manufacturier au cours du XVIIIe siècle a surpassé
celui de la Grande-Bretagne. La révolution dans l’exploitation minière inspirée
par l’influence de Leibniz s’est étendue depuis les centres caméralistes de
l’Allemagne jusqu’en Amérique du Nord et du Sud et même jusqu’au Japon [2]. »
Ce texte de
nature historique, bien que contestable, n’est pas notre sujet – l’économie –
et ne nécessite donc aucun commentaire.
« Bien que le
premier écrit de Leibniz au sujet de l’économie politique Société et Economie
date de 1671, ses travaux sur les machines à vapeur ont véritablement commencé
à Paris au cours de la période 1672-1676, pendant laquelle il se trouvait
auprès de l’Académie des Sciences, institution fondée par Jean-Baptiste Colbert
(1619-1683), l’associé et le successeur de Mazarin. Parmi les collaborateurs de
Leibniz les plus remarquables au cours de cette période, on trouve un autre
protégé de Colbert, Christiaan Huyghens (1629-1695), dont la conception des
machines à combustion est à l’origine des principes des moteurs à explosion à
essence et à diesel. »
Hors sujet également.
Pour néanmoins compléter cet éclairage historique, très partiel – partial ?
– il convient de rappeler que plus d’un siècle auparavant, Francisco de
Vitoria, érudit espagnol du XVIe siècle, fut l’inspirateur des penseurs
scolastiques connus sous le nom d’école de Salamanque, dont les recherches en
théologie, en droit naturel et en économie reposent sur les travaux de Thomas
d’Aquin et ont anticipé bien des thèmes retrouvés plus tard dans les travaux
d’Adam Smith et de l’école autrichienne d’économie (EAE). Indiquons au passage
un site en Français qui introduit de manière abordable au principaux concepts
de l’EAE, ici.
« Le
développement des machines à vapeur modernes date des travaux de Léonard de
Vinci (1452-1519) à la fin du XVe siècle. L’effort pour développer le charbon
comme combustible industriel fut entamé à la fin du XVIe siècle par les cercles
anglais associés au grand scientifique William Gilbert (1544-1603) [3]. Plus
fondamentalement encore, au regard du développement par Leibniz de la science
économique, Léonard a aussi élaboré les principes de la conception de machines,
jetant la base des travaux de Huyghens, de Leibniz et, plus tard, de l’Ecole
Polytechnique de Lazare Carnot (1753-1823) et de Gaspard Monge (1746-1818). Le
principe de moindre action de Leibniz, qui se trouve au centre de sa définition
du concept de « technologie » (ou de « polytechnique », selon l’expression
française d’alors), est dérivé des principes géométriques de la conception de
machines employés par Léonard. »
Encore un bout
d’histoire de la recherche en physique, sans intérêt donc, mais où on voit
poindre le « principe de moindre action », dont on verra qu’il est au
cœur de la théorie cheminesque mais pourtant sans rapport aucun avec l’économie.
Selon Wikipedia : « le principe de moindre action affirme qu’un corps prend
la direction qui lui permet de dépenser le moins d’énergie dans l’immédiat (ou
d’acquérir le plus d’énergie dans l’immédiat), en tenant compte qu’il doit y
avoir continuité du mouvement (positions et vitesses) s’il y a continuité des
conditions physiques. ».
« Le principe de
moindre action est si central à la science économique qu’il faut ajouter ici
quelques mots sur le développement de ces principes géométriques. »
Cela se
confirme, ce principe est mis en avant. Prenons donc le temps d’anticiper car
il n’y a rien d’économique dans tout cela, pas plus que dans les paragraphes à suivre,
que je sauterai pour plusieurs, tant ils sont hors sujet.
Cette vision d’optimisation
énergétique n’a rien à voir avec le problème que l’économie aborde, et le mur d’incompréhension
vient sans doute de cet écart d’objectif. On l’a vu lors de l’étude de l’avant-propos,
l’économie s’intéresse au fonctionnement social en présence d’une rareté
fondamentale et éternelle, celles des ressources disponibles pour assouvir l’infinité
des besoins et envies des hommes – on parle de « préférences » en EAE
et, à tort, « d’utilité » chez les autres écoles.
L’économie est
donc tout d’abord une science sociale et non purement technologico-physique. Il
est tout à fait vrai que la technologie et son étude sont de nature à apporter
des moyens aux hommes pour mieux ou plus assouvir ces « préférences »,
mais là s’arrête la pertinence du sujet traité par JC-LaRouche ici.
Le principe de
moindre action pourrait être rapproché de ce mécanisme de « préférence »
en ce sens que le premier guide le mouvement mécanique et thermodynamique là où
la seconde conditionne le choix continu des actions humaines. Mais là s’arrête
l’analogie. La « moindre action » exprimée par les physicien est une
grandeur mesurable en toutes circonstances. Elle ne dépend en rien de l’affect
humain. Alors que ce n’est absolument pas le cas des « préférences »,
toujours individuelles, constamment révisées, influençables et fugaces. Le
libre-arbitre fait qu’il n’est jamais possible de les connaître – ce qui rend
toute prévision de l’avenir impossible et même inconcevable.
Le texte qui
suit est inquiétant. Non seulement il ne traite pas d’économie, mais il laisse
entrevoir un ésotérisme qui ne dit pas son nom…
« Relativement à
toute période connue de l’Histoire, la rapidité du développement de la science
physique en Europe, du XVe au milieu du XIXe siècle, est supérieure de
plusieurs ordres de grandeur à celle de toute autre période ou de toute autre
branche de la culture humaine. Dans la mesure où ce développement puisse être
porté au crédit des contributions d’un seul savant, l’on peut dire qu’aucune
des découvertes de la physique mathématique moderne, en particulier, n’aurait
pu être possible sans l’œuvre du Cardinal Nicolas de Cues (1401-1463) que ses
écrits comme De la docte ignorance, firent connaître dans toute l’Europe et
au-delà. Le Cusain émit une hypothèse héliocentrique qui, dans une version
modifiée, a été employée et prouvée par Johannes Kepler (1571-1630), le fondateur
de la physique mathématique moderne [4]. Plus directement encore aux origines
du principe de moindre action de Leibniz, Nicolas de Cues opéra une révolution
dans la géométrie, en reconsidérant dans son intégralité le problème de la
quadrature du cercle posé par Archimède (environ 287-212 av. J-C). Il annonça
qu’il avait découvert une méthode supérieure à celle d’Archimède, découverte
connue aujourd’hui sous l’appellation de théorème isopérimétrique en topologie,
appelé par le Cusain le principe du minimum-maximum [ Appendice 1 ]. Cette
découverte est à la base du principe de moindre action de Leibniz, la clé pour
la mesure de toute technologie (polytechnique). La même découverte, sous sa
forme plus avancée employée par Karl Gauss (1777-1855), Lejeune-Dirichlet
(1805-1859) et Bernhard Riemann (1826-1866), est à la base de la méthode
LaRouche-Riemann d’analyse économique, le sujet de ce livre. »
« Avant la
production en Egypte de ce que l’on connaît aujourd’hui sous le nom des treize
livres d’Euclide, Les éléments, la géométrie grecque classique était, suivant
notre terminologie contemporaine, une géométrie synthétique. Il s’agit d’une
forme de géométrie qui exclut tous les axiomes, les postulats et les méthodes
déductives formelles d’obtention des preuves associés aux théorèmes d’Euclide.
La seule forme d’existence auto-évidente [self-evident], en géométrie
synthétique, est l’action circulaire ; les définitions de la ligne droite et du
point sont dérivées du pliage d’un cercle sur lui-même. En géométrie, toute figure
doit être construite en n’utilisant rien d’autre que la seule action
circulaire, plus la droite et le point ainsi définis. La redécouverte par
Nicolas de Cues que l’action circulaire est une forme d’existence soi-évidente
dans l’espace visible, la preuve isopérimétrique, a révolutionné la géométrie
européenne parmi les successeurs du Cusain tels Luca Pacioli (1450-1520) et le
collaborateur de Pacioli, Léonard de Vinci. Les travaux du Cusain, de Pacioli,
de Léonard et des successeurs de Léonard, tels Albrecht Dürer (1471-1528) et
l’Ecole de Raphaël (Raffaelo Sanzio, 1483-1520), ont constitué la base des
travaux de Kepler, de Gérard Desargues (1591-1661), de Pierre Fermat
(1601-1665) et de Blaise Pascal (1623-1662), tous contributeurs à l’œuvre de
Leibniz, directs ou indirects mais essentiels. Les travaux de Gauss, Dirichlet
et Riemann sont basés sur cette même méthode géométrique [5]. »
« Le sujet
principal des travaux sur la géométrie de Pacioli et de Léonard, a porté sur la
maîtrise du principe des cinq solides platoniciens extrait du Timée [6] de
Platon (environ 427-347 av. J-C). C’est la preuve que dans l’espace visible («
Euclidien »), seules cinq espèces de polyèdres réguliers peuvent être
construites par les méthodes de la géométrie synthétique. Ces cinq espèces sont
1. le tétraèdre
régulier ;
2. le cube ;
3. l’octaèdre ;
4. le dodécaèdre à
douze faces ;
5. l’icosaèdre à vingt
faces. »
« (1), (3) et (5)
ont pour faces des triangles équilatéraux égaux ; les faces du dodécaèdre sont
des pentagones réguliers égaux. Pacioli a construit une preuve de ce théorème
dans ses Proportions divines (Divine Proportione, 1494). Une preuve plus
rigoureuse a été donnée par Leonhard Euler (1707-1783), preuve qui est au
centre du développement par Euler de la topologie sur la base de l’analysis
situs de Leibniz. On prouve facilement que chacun des quatre autres solides
platoniciens est dérivé du dodécaèdre ; à ce propos, on montre également que la
Section d’Or, méthode géométrique synthétique employée pour la construction
d’un pentagone régulier ou d’un dodécaèdre, est le trait caractéristique de
l’unicité des cinq solides platoniciens. »
« La conception
de l’Acropole d’Athènes est l’éclatante démonstration du fait que les
contemporains de Platon et ses prédécesseurs de la Grèce Classique utilisaient
une géométrie synthétique construite à partir de la Section d’Or. Aussi, en
comparant l’œuvre d’Albrecht Dürer avec les rapports harmoniques employés pour
la conception de l’Acropole, on peut montrer que les Grecs classiques
comprenaient le principe redécouvert par Pacioli et Léonard de Vinci suivant
lequel tous les processus vivants se distinguent géométriquement des processus
non vivants par le fait essentiel que la morphologie de la croissance des
processus vivants et des fonctions déterminées par cette croissance est celle
d’un modèle soi-similaire de croissance, tel que la soi-similarité est dans un
rapport harmonique congruent avec la Section d’Or. »
« Reconnaissons
que, pour ces raisons, diverses sectes ont tenté de lire de mystérieuses
propriétés dans le Pentagone et la Section d’Or. Il n’y a rien de mystique dans
tout cela, pour quelqu’un qui connaît l’œuvre de Gauss et de Riemann s’y
rapportant. Avant d’arriver au terme de ce texte, le lecteur, libéré de toute
mystification, aura compris les rudiments de ce sujet et leur indispensable
fonction dans la science économique. Pour les besoins de ce chapitre, il nous suffira
d’effleurer ici quelques points directement à l’origine des découvertes de
Leibniz en science économique. »
« Premièrement,
la signification de la relation de la Section d’Or à la morphologie des
processus vivants commence à prendre sens une fois que l’on a reconnu pourquoi
ce que l’on appelle une série de Fibonacci (Léonard de Pise, probablement âgé
de 30 ans environ, quand il écrit son Liber Abaci en 1202) converge vers une
valeur déterminée par la Section d’Or. Une série de Fibonacci est une série géométrique
(série de nombres entiers déterminés géométriquement) qui estime avec précision
la croissance des populations, y compris celle des populations de cellules.
Quand les nombres dans la série deviennent modérément grands, le rapport de
deux nombres successifs dans la série converge rapidement vers la valeur de la
Section d’Or. Avec une simple observation des plantes, on peut ainsi retrouver
la découverte de Pacioli et de Vinci en ce qui concerne la vie végétale. Les
travaux de Léonard sur l’anatomie des hommes, des chevaux, et d’autres
organismes vivants consistaient principalement en une étude scientifique du
même principe de la Section d’Or [7]. Non seulement les formes du corps humain,
par exemple, sont déterminées par le principe de la Section d’Or, mais la
dynamique de la morphologie des fonctions corporelles aussi. »
« Parmi les
nombreuses branches de la science moderne fondées par lui, principalement sur
la base de ces principes géométriques, Léonard de Vinci a appliqué ses études
de la dynamique anatomique à la conception des armes, des outils et des
machines. En ce qui concerne les armes, par exemple, la connaissance de la
dynamique de l’anatomie a été utilisée pour les concevoir et les développer,
comme s’il s’agissait d’outils, en tirant avantage des potentialités optimales
des mouvements vigoureux du corps du combattant, de manière à ce qu’il porte le
plus efficacement possible l’attaque contre l’adversaire en le mutilant ou en
le tuant. C’est en partant du même point de vue, qu’il a développé les
principes de la conception de machines. »
« Pour la simple conception des machines
actionnées mécaniquement, on étudie les mouvements de l’ouvrier fabriquant un
type de produit. L’observateur en déduit quels aspects de ces mouvements sont
essentiels au travail effectué. Ces mouvements essentiels sont incorporés dans
une machine à laquelle on fournit de l’énergie : énergie animale, énergie
hydraulique, énergie éolienne, énergie calorifique... Ainsi, l’ouvrier
utilisant cette machine a un plus grand pouvoir de production que le même
ouvrier sans la machine. »
Non, pas plus
de « pouvoir » pour l’ouvrier, on l’a vu plus haut.
« Cependant, en
général, la puissance appliquée au travail par une machine n’est pas la même
que celle fournie à la machine en tant que telle. Une machine très simple, une
lame de couteau, illustre ce point : la pression exercée par l’arête aiguisée
de la lame est bien supérieure à la pression exercée sur le manche du couteau.
La puissance est davantage concentrée. Nous mesurons une telle concentration de
puissance comme accroissement de la densité du flux énergétique. Ceci mesure la
concentration de puissance par centimètre de mouvement ou par mètre carré de la
section d’action ou par mètre cube du volume d’action. Si on imprime une
impulsion instantanée d’une tonne-poids à une machine, et si cette poussée est
concentrée mille fois sur une surface de travail donné, on applique une
impulsion instantanée à cette surface de travail au maximum égale à mille
tonnes-poids. Dans notre texte, nous mesurerons fréquemment notre flux
énergétique en kilowatts et notre densité de flux énergétique en kilowatts par
kilomètre carré ou par mètre carré. »
« La première
mesure des effets de la conception de machines est la comparaison entre
l’effort humain requis pour faire fonctionner la machine, et la quantité de
travail fournie par l’opérateur employant la machine. Si la machine est
actionnée par autre chose que l’effort musculaire humain, nous devons mesurer
le coût de production de l’énergie animale, de l’énergie hydraulique, de
l’énergie éolienne ou de l’énergie calorifique en considérant l’effort humain
consenti par la société pour s’organiser et fournir cette énergie à la machine.
Nous pouvons le considérer comme le coût en capital nécessaire à la fourniture
de cette énergie. Nous devons ensuite comparer les variations du coût en
capital par opérateur utilisant telle ou telle classe particulière de machines
avec les variations de son débit correspondant à cette utilisation. »
Nous revoilà devant
une tentative de faire de l’économie, puisqu’apparaît soudain un « coût en
capital » sorti on ne sait trop d’où. Répondons par une question simple
pour faire écho au charabia : Comment se mesure l’effort humain ?
L’effort en
physique se mesure avec la notion fort
malheureusement dénommée « travail ». Mais en économie, les watts n’ont
pas lieu d’être car on ne peut guère les échanger entre humains – demain,
payerons-nous en « piles » au lieu d’euros ? Ce qu’on peut
tenter d’apprécier, c’est le coût de cet effort. En nourriture, en temps passé
et donc pas passé à autre chose, par exemple. Toute cela finit par avoir un
prix, le prix exprimé en monnaie, seule manière possible d’estimer la valeur
des choses. Donc faire fonctionner une machine aurait un prix. La belle affaire,
grande nouveauté.
« Cette
comparaison conduit à une fonction mathématique. Imaginez un graphe sur lequel
on porte en ordonnées l’accroissement du débit de production par opérateur et
en abscisses l’accroissement du coût en capital de l’énergie à fournir par
opérateur. Maintenant, étendez le champ de cette fonction mathématique en
ajoutant un axe des Z. Sur celui-ci, on porte l’accroissement de la densité du
flux énergétique correspondant à l’effort consenti par la machine. Jusqu’à la
fin du livre, nos références à une fonction mathématique de ce type désigneront
la fonction tridimensionnelle identifiée ici. »
Ahhh le
fantasme de la fonction mathématique, il en aura fait faire des bêtises en économie…
Ici, l’erreur ne semble pas immédiate. En effet, il paraît logique de penser qu’implicitement,
il y a une courbe, une relation continue entre « débit de production »
et « coût » humain. Ce n’est pourtant pas vrai, et là s’écroule ce
genre de théorie.
En effet, ce coût
humain n’a pas d’unité propre, absolue. La notion de coût est un ressenti
propre à chaque individu. Pour certains ce travail sera plus ou moins facile,
pour d’autres il sera plus ou moins agréable. Et surtout, à partir d’un certain
niveau, ce coût sera rédhibitoire par rapport à d’autres tâches ou travaux ou
plaisirs possibles. Les hommes ne sont pas des machines, leur travail a un prix
et ce prix n’est pas une fonction continue. A partir de là, le reste de cette théorie
tombe.
« Dans la
transmission au travail, à travers la machine, de la puissance fournie à son
entrée, une partie de cette puissance est perdue sous forme de « chaleur » ou
autre. Le taux de perte est particulièrement intéressant quand nous accroissons
significativement la concentration de puissance, la densité du flux énergétique
de l’effort appliqué au travail. Nous rencontrons à ce point une considération
curieuse, amusante. Nous tendons à accomplir de bien plus grands débits de
travail avec une fraction de la puissance fournie à la machine à un niveau
élevé de densité de flux énergétique, qu’avec toute la puissance fournie à la
machine à un niveau de densité de flux énergétique relativement moins élevé. Il
apparaît ainsi que moins de puissance accomplit plus de travail qu’une plus grande
quantité de puissance : c’est là l’un des aspects curieux de la science
économique qui touche plus ou moins directement à ses fondements. »
« L’autre aspect
général de la fonction mathématique qui nous intéresse au plus haut point est
le phénomène de la « diminution des taux de retour sur investissements ».
A partir de quel moment les accroissements du coût en capital par opérateur, ou
de la densité de flux énergétique ne nous permettent-ils plus le même taux de
croissance de la production que lors des précédentes augmentations de
l’intensité du coût en capital, ou de la densité du flux énergétique, ou des
deux combinées ? »
Bonne
question. Mais il n’y a aucun moyen de le savoir. Chaque homme étant différent,
ce seuil de bascule varie avec chacun de nous et aucune loi n’est capable de le
décrire, ni ne le sera jamais.
« Les mêmes
principes s’appliquent à l’agriculture. Nous mesurons la production de
l’agriculture de deux manières :
1. la production par
tête ;
2. la production par
hectare ou par kilomètre carré.
En première
approximation, nous mesurons la production elle-même en termes tels que
boisseaux de blé, tonnes de production animale comestible... Finalement, en
économie, nous devons mesurer ces produits comme des composants d’un « panier
de biens ». Il y a deux « paniers » :
1. les biens
d’équipement par opérateur employé dans l’agriculture, l’industrie, la
construction, l’industrie minière et les transports ;
2. les biens de consommation
exigés par tête pour l’entretien des ménages. »
Voilà qu’est réinventée
la notion de PIB, avec bien sûr les mêmes erreurs fondamentales. On ne peut
rien mesurer de valable avec un « panier ». Qui choisit le panier ?
Pourquoi est-ce le même pour tous alors que chacun a des goûts et des capacités
différents ? Comment évolue ce panier ? Nous sommes dans l’approximation,
pas dans la mesure et certainement pas dans la science. La mesure par « panier »
n’est pas une mesure valable, elle ne peut pas exprimer une caractéristique
scientifique objective, encore moins subjective – propre à chaque individu.
« En utilisant
les « paniers de biens » comme étalons de mesure, la production se trouve
comparée aux apports nécessaires à la société qui effectue cette production. La
production doit être mise en corrélation avec le nombre total de kilomètres
carré occupés par cette société ; c’est une mesure du taux d’activité
productive par kilomètre carré, une mesure associée à la notion de densité du
flux énergétique. Les deux mesures, par kilomètre carré et par tête (par
opérateur) sont combinées par le biais de la densité démographique. »
Ah, voilà qu’en
plus on introduit et l’occupation de la surface par les hommes, et leur démographie,
bien sûr soi-disant pour tenir compte de leurs besoins en effort-machine. Mais
un tel modèle lui non plus ne représente en rien la réalité dans sa complexité.
Car il y a des hommes qui aiment et recherchent l’isolement, d’autres qui au
contraire aiment les cages à poules. Les hommes sont tous différents, c’est ce
qui fait leur force. Et c’est aussi ce qui fait que la problématique économique,
celle du « juste » accès aux ressources, se pose.
Car si nous étions
tous physiquement et psychologiquement égaux, eh bien cette théorie le montre,
on pourrait nous modéliser et l’économie serait un sujet clos depuis longtemps.
Mais cela n’est pas le reflet de la nature humaine. Nous ne sommes pas modélisables.
En fait ce
genre de modèle considère l’homme comme une ressource comme une autre et se
focalise sur la recherche de l’optimum industriel, comme si c’est cet optimum là
qui comptait dans la vraie vie. Dans la vraie vie, on se fout de la densité démographique
tout comme de la densité de flux énergétique. Les contraintes de surface et de
procréation et d’accès à la nourriture sont traitées comme des besoins parmi d’autres
sur lesquels chacun de nous fait des arbitrages continuellement en
fonction de ses préférences instantanées. Aucune mathématique dans cette vraie
vie-là et surtout à l’inverse, un tel modèle purement physique ne peut pas
rendre compte de tels arbitrages.
De plus, ce
genre de modèle suppose implicitement – ce n’est pas dit dans ce texte – un supra-humain
qui modélise et surtout qui optimise les paramètres du modèle pour maximiser son
rendu. Il faut donc un dominant, une bureaucratie, un état, peut importent les
termes, un expert, pour organiser la vie économique et ordonner ensuite, sous
prétexte de leur bonheur ainsi optimisé, aux hommes de se conduire en moutons
qui suivent les ordres de production donnés. Voilà exactement ce qui caractérise
une économie planifiée. Le socialisme et son grand frère le communisme sont
juste derrière la porte.
« Le cas de
l’agriculture illustre la manière dont les principes déterminant la conception
des machines à combustion s’appliquent à l’ensemble des processus économiques. »
Eh bien non
justement, on a vu que l’approche de Leibnitz-Cheminade-LaRouchene marche ni
pour les machines, ni pour l’agriculture. Elle ne modélise pas l’homme, mais
une machine humaine. Rien d’humaniste là-dedans.
« L’importance de
la machine à combustion, dans le processus économique pris dans son ensemble,
est mesurée à l’aune de l’économie d’effort humain total (et moyen). L’image de
cette mesure est transmise par l’idée de fournir le même panier de biens par
tête à l’aide d’un moindre effort de la société tout entière, et par le fait
que le contenu de ce panier puisse être élargi, en quantité et en qualité, sans
accroître l’effort engagé à cet effet par la société. Autrement dit, les
méthodes d’économie du travail constituent l’essentiel du résultat à mesurer en
économie politique. C’est le meilleur étalon pour mesurer le revenu national
dans la comptabilité publique [8]. »
On avait bien
compris l’idée déjà plus haut. On croit pouvoir ramener l’économie à un problème
de recherche opérationnelle, celui de trouver le moindre « coût »
pour assurer à tous le même « panier », sujet bêtement différentiel.
Il convient de
rappeler ici que dans l’avant-propos de ce livre (article précédent), JC tape
sur la tête de R.Barre qui ose employer des équations algébriques dans son économie
à lui. Mais que fait donc JC (ou LaRouche pour être plus exact) si ce n’est la même
chose ? La seule différence tient dans l’approche de modélisation, mais
cela ne change rien de fondamental, cela reste de la mise en équations.
Car les deux
commettent la même erreur profonde : croire qu’on peut mettre la dynamique
de l’action individuelle et sa myriade d’échanges libres sur le marché en une
simple série d’équations. Ludwig von Mises a depuis longtemps réglé cette
question en rappelant qu’un système d’équations suppose une unité de mesure, de
référence, qui elle-même suppose une constante. En physique, le mètre est défini
à partir d’une longueur d’onde atomique, immuable. Mais en économie, rien n’est
immuable, il n’existe aucun aspect constant dans la vie sociale, et donc rien de
social ne peut être mesuré. Même les prix ne sont pas des valeurs absolues, mais
des ratios. La mise en équation est vouée à l’échec, quelle que soit la démarche
de modélisation adoptée.
« Nous avons déjà
rapporté que l’utilisation générale de la combustion du charbon pour faire
fonctionner les machines — en vue de supprimer la dépendance vis-à -vis de la
combustion du bois ou de la puissance hydraulique ou éolienne — a été le
critère adopté par Leibniz pour fonder la science économique. Nous avons déjà
identifié les principales caractéristiques de la fonction mathématique exigée.
Le coût de la production du charbon doit être comparé au bénéfice obtenu en
brûlant le charbon pour faire fonctionner les machines. La fonction de la
machine à vapeur, selon Leibniz, est de permettre à un opérateur utilisant
cette machine, de parvenir à une production de travail égale à celle « d’une
centaine d’autres » opérateurs ne disposant pas d’une telle machine. L’économie
de travail (travail épargné) représentée doit être comparée au prix de la
machine et à celui de la consommation de charbon. Le prix de la consommation de
charbon inclut celui de son extraction minière et son transport de, ainsi que
les coûts de la combustion requise pour le transformer en une source d’énergie
pour la machine.
Dans notre description
initiale de la fonction mathématique requise, donnée quelques paragraphes plus
haut, nous avons défini la fonction dans les termes de référence appropriés à
la comparaison de machines entre elles. Nous devons maintenant redéfinir cette
fonction. Posons d’abord A, l’économie de travail obtenue par les améliorations
des pouvoirs producteurs du travail apportées par les machines à combustion, et
posons ensuite B, les coûts additionnels encourus par la société pour la
production, la maintenance et l’entraînement de ces machines ; c’est la valeur
de (A - B = C) ramenée par tête, C désignant la marge nette du gain de la
société, qui doit être considérée dans la définition des termes portés sur
l’axe des ordonnées. Ce gain C définit un nouveau niveau de production (et de
consommation) par tête de la société, impliquant un élargissement du panier de
biens estimé par tête. A quels niveaux d’augmentation d’intensité
capitalistique et de densité du flux énergétique cette fonction indique-t-elle
des retours sur investissements « en diminution » ?
« On obtient la
valeur approximative de l’intensité capitalistique en établissant le rapport
entre travail total consommé (par opérateur de machine), en tant que capital,
et travail moyen de l’opérateur sur la machine. Les coûts en capital à retenir
pour établir ce rapport comprennent le travail requis pour produire et
maintenir la machine, pour lui fournir son énergie, mais pas les postes
constituants des « frais généraux » comme l’administration, les divers types de
services non-scientifiques, les coûts de vente, les charges financières, etc. »
Il faut reconnaître
à JC-LaRouche une certaine honnêteté puisque par exemple ci-dessus – et à d’autres
reprises – il admet faire des approximations. C’est bien tout le problème de ce
genre d’approche, qui pourtant se prétend scientifique.
A titre de
comparaison, rappelons que l’EAE repose sur une approche entièrement construite
sur la déduction logique, à partir d’un noyau très limité d’axiomes
incontestables. De ce fait, tout ce que l’EAE peut tirer comme lois de l’exposition
des phénomènes de choix et d’interrelation sociale est strictement exact. Il n’y
a pas la moindre approximation. Par contre, l’EAE repose sur de nombreuses
inconnues et qui le restent, à commencer par les préférences individuelles, ce
qui lui rend impossible toute prédiction autre que très générale.
« Lorsque
l’intensité capitalistique augmente, quel est le taux correspondant
d’accroissement de la productivité moyenne du travail dans la société toute
entière ? Nous pouvons encore prendre pour base de comparaison l’accroissement
des pouvoirs producteurs de cette seule composante de la force de travail
totale que sont les opérateurs actifs. En fait, ces deux mesures de
l’accroissement de la productivité par tête devraient se recouper. »
« La « courbe »
de notre fonction mathématique, définie par la mise en corrélation des
accroissements de l’intensité capitalistique avec ceux de la productivité
moyenne du travail, est une courbe décrivant l’accroissement de la capacité à
accomplir du travail. Nous devons procéder à la même extension de cette
fonction que celle à laquelle nous avons procédé pour définir le fonctionnement
de la machine quelques paragraphes plus haut ; nous devons ajouter l’axe des Z,
l’accroissement de la densité de flux énergétique. Nous obtenons alors une «
courbe » qui décrit la diminution des retours sur investissements à partir d’un
certain point d’accroissement de l’intensité capitalistique, si la densité de
flux énergétique demeure constante. Nous obtenons aussi une courbe qui rentre
dans une région de retours sur investissements en diminution si la densité de
flux énergétique augmente à intensité capitalistique constante. Nous obtenons
une courbe différente quand les deux s’accroissent simultanément. Les courbes
intéressantes sont celles pour lesquelles l’intensité capitalistique et la
densité de flux énergétique augmentent simultanément, mais avec des taux
d’accroissement différents. Les plus intéressantes parmi celles-ci sont celles
pour lesquelles les taux d’accroissement relatifs de chacune d’entre elles
varient, linéairement ou non, et pour lesquelles les taux de variation de
l’accroissement relatif des deux sont eux-mêmes décrits par une fonction
mathématique. Cette fonction est une fonction du niveau d’intensité
capitalistique et de la densité du flux énergétique. »
« En d’autres
termes, dans les cas les plus intéressants, il est impossible de faire
progresser efficacement l’intensité capitalistique sans agir, en même temps et
aussi peu que ce soit sur la densité du flux énergétique. Il est impossible
d’accroître efficacement la densité du flux énergétique sans agir un minimum
sur l’intensité capitalistique. Ce cas intéressant est celui que l’on rencontre
dans les processus économiques réels. »
« Imaginez le cas
hypothétique de deux machines à combustion consommant la même quantité horaire
d’énergie générée à partir du charbon, mais dans lequel un opérateur utilisant
un de ces deux types de machines a un taux de production supérieur à celui d’un
autre opérateur utilisant l’autre type. La différence entre ces deux types de
machines est une différence tenant à l’organisation interne des machines. C’est
sur cette différence que repose la définition donnée par Leibniz de la
technologie (historiquement connue, en France, sous le nom de « polytechnique
»). »
« L’économie
physique est l’étude des types indiqués des fonctions mathématiques du point de
vue de la polytechnique (ou technologie). »
Et bien non,
justement, ce n’est pas cela l’économie. L’économie n’est pas un champ mathématique
désincarné. L’économie, c’est avant tout des hommes et l’homme ne se met pas en
équations.
« En première
approximation, la polytechnique (ou technologie) est définie par la quantité
équivalente d’action circulaire nécessaire à la transformation par la machine
de la puissance appliquée en travail. »
« Comme en
astronomie, par exemple, les processus internes de la machine sont étudiés en
tant que cycles d’évolutions dans la direction de l’action appliquée, et tout
cycle correspondant à ce changement est défini en englobant les moindres
cycles. Avec l’aide de ce que Nicolas de Cues appelait le principe du
minimum-maximum, le principe isopérimétrique, on détermine l’action circulaire
équivalente à l’action accomplie par la machine. Ceci est l’application du
principe de moindre action à l’analyse de la polytechnique (« technologie ») du
cycle de la machine. »
« Ce n’est pas
parce que beaucoup de machines sont associées à l’action de rotation que l’on
adopte cette façon de faire ; les machines sont dominées par l’action rotative
car cela est requis par le principe physique de la nature correspondant au
principe de moindre action de Leibniz. »
« Pour ajouter la
fonction de l’axe des Z de notre fonction mathématique générale, nous devons
refléter l’accroissement de la densité du flux énergétique au sein de
l’interprétation par l’action circulaire. Ceci conduit à un ordre supérieur
d’action circulaire, l’action conique spirale. Les implications les plus
profondes de ce résultat sont clarifiées en examinant cette caractéristique de
la fonction à partir des remarquables travaux effectués par Gauss et Riemann
sur les fonctions coniques spirales soi-similaires. »
La suite vaut
son pesant de cacahuètes :
« Il faut
reconnaître qu’aucune institution dans le monde, en dehors de l’auteur et de
ses collaborateurs, ne pratique aujourd’hui la science économique telle que
Leibniz l’a définie ; en dehors des cercles entourant l’auteur, aucune
université quelconque, à notre connaissance, ne traite la science économique
comme Economie Physique, ou ne reconnaît que l’Economie Physique et la Physique
Mathématique, se recoupent et constituent des sujets de recherche inséparables.
A la suite du Congrès de Vienne de 1815, aucun nouveau travail dans le domaine
de l’Economie Physique n’a été effectué. En dehors des programmes caméralistes
établis ou poursuivis sous l’influence de Leibniz, le principal centre
pratiquant l’Economie Physique au début du XIXe siècle a été l’Ecole
Polytechnique de 1794 à 1815, sous la direction de Lazare Carnot et de son
professeur Gaspard Monge. A partir de 1816, avec l’exil de Carnot en Allemagne,
l’institution a été reprise et ruinée par Pierre-Simon Laplace (1749-1827), une
destruction épistémologique et morale poursuivie sous la direction d’Augustin
Cauchy (1789-1857) [9]. »
Il ne fait pas
de doute que si aucune autre ligne de pensée n’a suivi et développé la théorie
abordée ici, c’est qu’elle ne résout pas le problème posé, autrement dit qu’elle
ne traite pas d’économie. Je ne me permettrai pas de dénoncer cette théorie
comme totalement inutile et sans fondement, ce n’est pas mon propos et je n’ai
vraiment aucun avis – même si tout cela sent fort l’approximatif. Mais par contre,
je suis sûr d’une chose : il ne s’agit pas d’une théorie permettant de décrire
les phénomènes humains qui interviennent dans la société à titre « économique ».
« L’application
des principes de l’Economie Physique aux progrès de l’économie politique fut
poursuivie avec succès au-delà de 1815 par les représentants du Système
Américain d’Economie Politique tels que Friedrich List (1789-1846), Henry C.
Carey (1793-1879) et E. Peshine Smith (1814-1882). Carey, avec Henry Clay, fut
un dirigeant des Whigs et le conseiller en économie du Président Abraham
Lincoln. L’ami de Carey, E. Peshine Smith, fut, à partir de 1872, le conseiller
de la Restauration Meïji au Japon, et a assisté le Japon dans sa marche vers
une industrialisation aujourd’hui admirée et enviée dans maintes parties du
monde. Ainsi, leur travail a eu un impact majeur sur l’histoire mondiale durant
et au-delà de leur vie, mais ils n’ont apporté qu’une contribution marginale au
corps des connaissances de la science économique telle qu’elle fut développée
par Leibniz et ses successeurs de 1671 à 1815. »
« La méthode et
le courant de Leibniz ont été par ailleurs vigoureusement maintenus en
Allemagne par quelques institutions phare jusqu’à la mort de Gauss (1855), de
son successeur immédiat, Lejeune-Dirichlet (1859) et du collaborateur et
successeur de Gauss et Dirichlet, Riemann (1866). Bien que Dirichlet, un
protégé de Alexander von Humboldt, ait étudié à l’Ecole Polytechnique en
collaboration avec Humboldt et que Humboldt lui-même ait été en relation
étroite avec Carnot jusqu’à la mort de ce dernier en 1823, le cercle de
Humboldt à l’Université de Berlin et leurs alliés Gauss et les cercles de
Göttingen n’ont pas étendu leurs remarquables découvertes en physique
mathématique au domaine de l’Economie Physique en tant que telle. Il est
singulier que l’auteur ait dû être le premier à reconnaître, en 1952,
l’adéquation de l’œuvre de Riemann aux problèmes fondamentaux non encore
résolus de la science économique. »
« Henry C. Carey
était au moins quelque peu conscient de ce problème et de sa signification. L’Unité
de la Loi de Carey (1872) est de ce point de vue exemplaire. Dans les grandes
lignes, l’objectif de Carey est correct et nombre de ses arguments relèvent de
conceptions qu’aucun étudiant sérieux en économie ne devrait négliger. L’aspect
malheureux de ce livre réside dans le fait que Carey était à cette époque sous
l’emprise d’une admiration déplacée pour le Professeur Eugen Dühring [10] de
l’Université de Göttingen, une célébrité éphémère de l’époque. Sous cette
influence, les références de Carey aux principes physiques reflètent l’autorité
de personnalités et de thèses directement opposées à celles de Riemann et de
Gauss. Aussi, bien que Carey insiste correctement sur la nécessité de la prise
en compte de la thermodynamique en science économique, il s’appuie sur la
mauvaise doctrine de la thermodynamique. »
Pour finir, un
peut de mythomanie, il faut ce qu’il faut, l’auteur est très fier de lui :
« Les propres
contributions de l’auteur à la science économique sont centrées sur une
découverte faite d’abord en 1952. Dans le fil de son effort, pour réfuter la
thèse de la « théorie de l’information » de Wiener-Shannon, il fut amené (au
cours de la période 1948-1952), à étudier les travaux que Georg Cantor avait
effectué sur les ordonnancements transfinis au cours de la période 1871-1883.
Ceci le conduisit à corriger et à renouveler sa perspective sur les travaux
effectués par Riemann dans la période 1852-1859 [11]. Il reconnut alors que la
physique mathématique riemannienne résout implicitement le problème de la
mesure de la relation existant entre une certaine quantité de progrès
technologique et l’accroissement du taux de croissance économique en résultant.
Aussi, la méthode développée à partir de ce point de départ est ici appelée
méthode LaRouche-Riemann. »
« Nombre de
mathématiciens et autres spécialistes de physique mathématique, ainsi que de
disciplines associées, se sont joints aux étudiants des classes de science
économique de l’auteur. Avec leur collaboration, à partir de 1970, la forme
originale de la méthode LaRouche-Riemann a été développée et appliquée à
l’analyse et aux prévisions économiques. Ce travail en science économique est
inséparable des travaux qui se poursuivent sur la fusion thermonucléaire
contrôlée et sur d’autres secteurs-frontières de la physique des plasmas. Dans
cette mesure, la tradition de Leibniz et de l’Ecole Polytechnique put renaître. »
Voilà maintenant
que l’économie serait proche non seulement de la thermodynamique, mais aussi de
la thermonucléaire. Cela me rappelle certains commentaires sur Facebook que
Bruno Lardoux me fait à propos du libéralisme, qui serait « intrinsèquement
entropique ». Je n’avais jamais compris comment il pouvait faire un
quelconque lien entre liberté et thermodynamique, je comprends mieux désormais.
Pour lui, la
liberté est une perturbation, en effet, puisque des hommes qui auraient un
comportement « brownien » ne permettraient pas à « la Machine »
de passer par la « ligne de moindre action » si chère à notre ami.
Donc oui, avec une vision thermodynamique du monde, la liberté est source d’entropie.
Le seul problème, c’est que la réalité est têtue et les hommes sont tout sauf des moutons et c’est la
théorie de l’homme-machine qui est dans l’illusion. Pas la liberté ni le libéral.
Cheminade,
LaRouche et Lardoux prennent le problème de l’économie à l’envers. Ils veulent
faire entrer l’humanité dans leur jolie boîte, au lieu de tenter de trouver une
boîte adaptée à l’humanité. Seule l’EAE a trouvé la bonne boîte.
« L’importance
d’un tel recouvrement d’activité est illustrée par les faits suivants. »
« Supposons que,
dans certains cas, nous perdions 80% de la puissance fournie à une machine, ou
à un processus, dans le cadre d’un effort visant à accroître la densité du flux
énergétique de plusieurs ordres de grandeur ou plus encore. Cependant, dans
quelques uns de ces cas, nous accomplissons plus de travail qu’il ne pourrait
en être obtenu en utilisant 100% de la puissance fournie à des niveaux moins
élevés de densité de flux énergétique. Nous avons souligné plus haut ce curieux
phénomène : la simple conversion d’énergie en travail est une notion
fallacieuse. Ce curieux phénomène est la caractéristique centrale des processus
vivants, mais nous le rencontrons aussi en considérant d’autres aspects du
travail scientifique. »
Noter la « notion
fallacieuse » des « processus vivants ». Elle consiste à s’étonner,
voire s’offusquer que le vivant ne puisse pas obéir à la loi du « toujours
plus ». On voit à quel point on a ici oublié que l’économie est un mécanisme
humain et non physique.
« Comme nous le
démontrerons plus loin, la science économique considérée du point de vue de la
physique mathématique riemannienne nous oblige à définir les termes de travail
et d’énergie d’une certaine manière, une manière opposée à celle que Clausius
(1822-1888), Helmholtz (1821-1894), Maxwell (1831-1879) et Boltzmann
(1844-1906) ont popularisée. Pour des raisons établies avec certitude par
Kepler, et par les compléments apportés par Gauss aux travaux de Kepler s’y
rapportant, les notions de travail et d’énergie dérivées de la science
économique sont nécessairement celles qui sont correctes, et se trouvent en
conformité avec les notions de la physique mathématique riemannienne en tant
que physique. L’économiste scientifique est par conséquent obligé de rechercher
dans les travaux des physiciens et des biologistes les cas expérimentaux
exigeant le recours aux mêmes notions de travail et d’énergie, que celles
relevant de l’économie. L’objet principal de telles recherches est de dégager
les aspects des processus physiques qui sont par nature les plus féconds pour
le progrès de la technologie. »
JC-LaRouche
nous réserve une conclusion digne d’un chef d’œuvre trotskiste ou hitlérien :
les notions de la « science
économique sont nécessairement celles qui sont correctes, et se trouvent en
conformité avec les notions de la physique mathématique riemannienne en tant
que physique ». Rien que ça. Autrement dit, j’ai modélisé le monde, et
oui, le monde a bien l’humilité d’être conforme à la vision que j’ai de lui.
Nous sommes face à un cas aigu de mythomanie de haute volée.
Nous voilà à la
fin de ce long texte, merci aux courageux qui sont arrivés ici. On a vu que
nous avons affaire à une théorie encore plus fumeuse que ces pourtant
nombreuses théories dites économiques qui reposent sur la mise de l’homme en équations.
Celle-ci repose en plus sur une vision purement mécanique et utilitaire de l’homme
et ne prend nulle part en compte ni l’affect ni la dimension interactive de la
vie sociale. Et dire que certains y croit dur comme fer.
Je pense qu’il
n’est pas nécessaire que je continue de
travailler sur ce livre, il n’en vaut pas la peine.
2 comments:
Tu as bien du courage de te taper tant de conneries, puis d'expliquer ce qui ne va pas.
"On ne corrige pas par la raison des croyances qui ne doivent rien à la raison."
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