Le touriste ou nouvel arrivant dans la ville rose qui met
pour la première fois le pied dans une des rames du métro automatique
toulousain peut être surpris – je l’ai été pour ma part – d’entendre au fil des
stations une voix féminine annoncer leurs noms, en Français bien sûr, mais
aussi en Occitan.
Dans une métropole qui se veut de dimension européenne et à
la pointe du progrès, où l’industrie locale a attiré de fortes communautés
anglaises et allemandes et qui attire la recherche mondiale, cette mise en
avant de notre – certes charmante – langue d’Oc à la place de la langue
internationale qu’est de fait l’Anglais a de quoi interpeller.
Bien évidemment, nous avons là le résultat d’une pression
politique locale, l’intérêt pour la masse des voyageurs étant sinon nul, tout
au plus de l’ordre de la curiosité. Sans doute un élu désœuvré a-t-il pensé
qu’il y avait là de quoi s’exprimer en faveur de la préservation des langues
régionales.
Car annoncer Jean
Jaurès ou Saouzelong en Occitan,
il est bien évident que cela favorise grandement l’apprentissage de cette
langue au quotidien, n’est-ce pas ? Nous voilà tout de suite équipés pour
aller acheter notre baguette à la boulangerie – pardon, la fornariá – du quartier.
D’ailleurs, nous ne sommes pas à court d’autres paradoxes
quant on élargit la question à celle de l’arabe. Comme dans de nombreuses
villes en France, l’arabe est parlé par des milliers de personnes à Toulouse et
dans sa banlieue. A quand des annonces en arabe dans le métro ? Et
pourquoi pas aussi en Anglais, bien évidemment, et sans oublier l’Espagnol, si
proche en géographie comme en histoire ? Voire l’Espéranto ?
L’air de rien, quelques milliers de nos précieux euros ont
donc été savamment dépensés pour cette fantaisie rigoureusement inutile. Et
personne ne trouve à redire, personne n’ose dénoncer ce genre d’inepties d’un
pouvoir sortant largement de son registre et de sa mission. On a pris
l’habitude de l’immixtion des pouvoirs publics dans un nombre toujours
croissant de facettes de notre quotidien.
Le plus incroyable dans cette histoire, c’est qu’il faut se
rappeler que si de nos jours personne ou presque ne parle plus l’Occitan, ce
n’est rien d’autre qu’une des conséquences de la création de la Communale,
l’école publique pour tous chère à Jules Ferry – homme de gauche – à la fin du
XIXe. Pendant des décennies, en gros jusqu’à la vague post-soixante-huitarde, la
chasse était faite à ceux qui parlaient Oc dans les écoles et autres organismes
publics. Le Français était obligatoire.
Et maintenant, après avoir dépensé pour imposer la
langue d’Oïl, nous voici face à de nouvelles dépenses en faveur de la
langue d’Oc. Ridicule. Or parler telle ou telle langue, est-ce là matière à
intervention politique ? Non bien sûr, c’est une affaire intimement
privée. Il y a d’ailleurs fort à parier que notre langue régionale aurait mieux
survécu si Ferry et ses héritiers n’avaient pas autant cherché à lui imposer le
seul français – donnant ainsi la possibilité à tous les fonctionnaires de suivre
les conversation privées des citoyens.
Ainsi donc, une anecdote d’apparence aussi banale que de
bizarres annonces dans un métro porte pourtant en elle toute une histoire
d’interventionnisme comme c’est hélas le cas pour tant d’autres domaines de
notre société liberticide.
Apprenons à les reconnaître et à les dénoncer les
unes après les autres afin d’espérer remettre à sa juste place ce pouvoir
politique sinon toujours plus affamé.
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