Nous avons atteint hier soir un sommet dans le ridicule journalistique, déjà bien avancé pourtant. Les médias télévisés autorisés avaient il faut croire si peu à dire qu’ils ont sauté sur l’occasion que le simple citoyen François Hollande leur offrait de parler pour ne rien dire en relayant sa petite phrase sur le « sacrifice inutile » des Français – la phrase prononcée étant en plus maladroitement ambiguë et laissant imaginer que ce puissent être les Français qui seraient les « inutiles »…
Il faut dire qu’il est clair que tout va tellement bien en ce pays qu’il n’y a rien à en dire qui aurait pu avoir plus d’importance que cette phrase inutile, c’est bien évident. Aucune information sur le chômage, le terrorisme, la baisse du pays dans le classement économique mondial, rien de tout cela ni tant d’autres sujets ne pouvait clairement prendre la place d’une petite phrase d’un incompétent.
Cela reflète évidemment le choix fait par le chef de rédaction de la ou des télévisions incriminées. On aurait pu rêver que ce responsable opte en effet plutôt pour un reportage, même rapide, sur un des sujets concernant réellement son auditoire en lieu et place de cette triste bouffonnerie. A cet égard, une analyse rapide pourrait conclure à une incompétence dudit chef de rédaction. Il n’en est rien.
Mettons-nous un instant à sa place. Un reportage de fond coûte cher : il faut financer un journaliste, voire toute une équipe pendant plusieurs jours au moins, faire une synthèse après moult réflexions, préparer des textes, monter les coupes, etc. De plus, la valeur est incertaine, le journaleux n’est jamais vraiment sûr que son sujet intéressera assez de monde pour que les retours publicitaires ou du moins la hausse de réputation remboursent cet investissement parfois conséquent.
Par contre, si Hollande ou autre « célébrité » quelconque appelle pour un vague discours, il suffit d’envoyer un porte-micro et un caméraman et hop, le tour est joué. Pas besoin de beaucoup d’argent et comme le « buzz » est pratiquement assuré tout de suite, le calcul est vite fait.
Bien sûr, un tel raisonnement est court-termiste et ne peut pas mener un tel journalisme bien loin, comme on le voit de plus en plus ces dernières années. Mais est-ce à dire que ce phénomène est intrinsèque au métier de journaliste ? Heureusement, non, il ne l’est pas. Il est lié au statut que le pouvoir politique et étatique veille bien à donner à ce simulacre dans nos démocraties sociales.
Car le journaliste n’est pas toujours mauvais, en conditions normales, il cherche à être pertinent car son métier et sa valeur envers ses lecteurs ou auditoire reposent précisément sur sa capacité à apporter une information ayant un intérêt, une connaissance, un éclairage. Alors pourquoi cela n’est-il presque plus jamais le cas de nos jours et du moins en cette circonstance minable ?
Dans le cas de la télévision et des chaînes dites d’information, l’absence de liberté d’accès aux ondes crée une quasi absence de concurrence qui nuit à la qualité des reportages. Quand XFM n’a personne en face – sauf une autre chaîne sur le même format qui n’est là que pour faire croire au libre accès aux ondes, il est évident que peu à peu, rien ne les poussant à la pertinence, le chef de rédaction a tous les motifs pour aller de plus en plus au plus facile, à ce qui coûte le moins.
Alors, dans un pays qui se veut de la liberté d’expression, à quand la fin des subventions à la presse, les niches fiscales des journalistes et la liberté d’imprimer et d’accéder aux ondes ?